27/08/2012

NICE : ZONE DE SÉCURITÉ… PRIVÉE 1-2

« La sécurité privée empiète de plus en plus sur la police en Europe », écrivait la journaliste Isabelle Mandraud dans l’édition du Monde du 16 décembre 2008, suite à l’ouverture, la veille, du premier sommet européen de la sécurité privée…au ministère de l'Intérieur - tout un symbole. Dans la préface d'un livre blanc rédigé pour l'occasion, Nicolas Sarkozy, alors chef de l'Etat, exhortait d’ailleurs à « coproduire des solutions public-privé de sécurité ». Défait le 6 mai dernier, Nicolas Sarkozy n’est plus président de la République mais ses fidèles poursuivent son œuvre au travers d’une association Les amis de Nicolas Sarkozy. [1] 

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Tous rêvent au retour de leur messie dans le jeu politique. [2] En attendant ce jour béni, ces dévots mènent une active guérilla contre son successeur socialiste accusé de tous les maux alors qu’il n’est au pouvoir que depuis cent jours. Ainsi, selon Christian Estrosi, député-maire de Nice, l’augmentation des vols avec violence dans sa cité est le « fruit de la politique irresponsable des socialistes ». [3] Comme le souligne pertinemment Thierry de Cabarrus, « Le pire, c'est que le maire de Nice n'en est pas à un paradoxe près. Car c'est juste après avoir développé avec force détails son action dans le domaine de la sécurité (par exemple la télésurveillance dans les quartiers "à nulle autre pareille") qu'il reconnaît la hausse de la délinquance à Nice. » [4] Versant délibérément dans l’outrance, Christian Estrosi dénonce ensuite le « clientélisme du gouvernement socialiste » pour l’attribution des quinze premières zones de sécurité prioritaires (ZSP) et annonce sa décision unilatérale de classer – sans aucune concertation – cinq quartiers de Nice en ZSP en ayant recours à des vigiles. La journaliste Mathilde Munos l’interroge alors sur le bien-fondé de son projet : « Vous allez financer des sociétés privées. Pourquoi ne pas renforcer la police municipale plutôt ? » La réponse du député-maire de Nice est surprenante, pour ne pas dire déconcertante : « Parce que dans la répartition des tâches entre l’Etat et la commune, l’Etat a décrété que ces zones urbaines sensibles étaient sous la compétence de l’Etat et la police municipale n’est pas habilitée de par la loi en matière d’ordre public à intervenir. Ce qui est une très bonne chose, je suis pour un Etat régalien. » N’est-ce pas là le comble du cynisme : s’ériger en défenseur d’un Etat régalien pour justifier le recours à des vigiles afin d’assurer la sécurité publique ? Le même affirmait pourtant dix ans auparavant que « l’État régalien est devenu un État régulateur, orientation confirmée par le colloque de Villepinte fin 1997, les contrats locaux de sécurité intégrant les services de sécurité privée parmi les interlocuteurs du partenariat pour la sécurité. » [5] Néanmoins, lors de son interview à France Info, il souligne la satisfaction de la population du premier quartier concerné par son initiative, citant notamment le témoignage abrupt d’un boulanger, Mohamed Id Moussa : « On appelle la police, elle ne vient pas ! » [6] Cependant, Christian Estrosi se garde bien de rapporter la suite de la réaction de cet habitant des Moulins et ne réalise visiblement pas que cette assertion sonne comme un désaveu cinglant de sa politique sécuritaire, notamment sa police municipale qu’il a pourtant portée au pinacle. [7]

 

Face à tant de mauvaise foi, quelques précisions s’imposent.

 

Christian Estrosi dénonce aujourd’hui une supposée incompétence de la gauche en matière de sécurité comme il fustigeait le bilan de celle-ci… en 2002 pour défendre « une politique de rupture en matière de lutte contre l'insécurité » :

 

Trop longtemps, en effet, le précédent Gouvernement [celui de Lionel Jospin] a hésité entre une justification sociale de la délinquance et la mise en œuvre de mesures timides de lutte contre l'insécurité. Ce débat idéologique, nourri par une vision selon laquelle il serait plus opportun de s'attaquer aux causes de la délinquance qu'à ses manifestations, a conduit à une croissance extrêmement forte du nombre de crimes et délits sur le territoire national. Dans ce contexte, pour tous ceux qui s'étaient résignés à voir dans l'insécurité une fatalité, il était devenu inutile et inefficace de prendre en compte tant le traitement des victimes que la répression de la délinquance.

Ces temps sont heureusement révolus : l'heure n'est plus à la recherche d'une explication sociale de la délinquance mais à celle de l'action. En matière de sécurité, en effet, les actes comptent davantage que les paroles. Sous l'impulsion du ministre de l'intérieur [Nicolas Sarkozy], une politique résolue de rétablissement de l'autorité de l'État et du droit de chaque citoyen à vivre en paix a été engagée. [8]

 

Dix ans plus tard, pour mesurer le succès de l’entreprise, citons la récurrence des violences urbaines avec un point d’orgue à l’occasion des émeutes de l’automne 2005 (à ce jour, aucun pays n’a connu un tel phénomène de violence, touchant un si grand nombre de communes, sur une telle durée) [9] ou la dégradation de l’image de la police, conséquence du délitement des relations de celle-ci avec la population (résultat de la politique du chiffre prônée pendant une décennie ?). [10]

 

Nice ne figurant pas dans la liste des quinze premières ZSP (zones de sécurité prioritaires), « Le sang de Christian Estrosi n’a alors fait qu’un tour » selon Nice-Matin et l’élu azuréen dénonce une « décision technocratique, reposant sur une méthode clientéliste qui consiste à servir ses amis socialistes ». Las, ce dénigrement n’est nullement justifié puisque contraire à la réalité. Des villes dirigées par la droite telles que Vauvert, Méru, Marseille, Mantes-la-Jolie ou Corbeil-Essonnes sont ainsi incluses dans le nouveau dispositif alors que des localités socialistes comme Toulouse, pourtant symbolique, en sont exclues au grand dam de l’opposition UMP locale. [11] Cette évidence n’empêche évidemment pas les critiques puisqu’« il y a des malheureux suite à ces choix. Parmi eux, ceux qui n’en sont pas et demandent à faire partie de cette liste. Et ceux qui sont dans les ZSP et qui s’en plaignent ». [12] Comme le souligne Le Figaro, « la grogne monte chez les laissés-pour-compte » et Christian Estrosi sonne la charge contre ce « saupoudrage ». Or, la circulaire du 30 juillet 2012 relative à la mise en œuvre des ZSP spécifie au contraire que « Pour éviter une dispersion des ressources, ces actions devront être concentrées sur un nombre restreint d’objectifs, clairement identifiés » (page 2). En outre,comment aurait réagi l’actuelle opposition si l’expérience des zones de sécurité prioritaires avait été étendue d’emblée à l’ensemble du territoire national et exclusivement définie depuis Paris ? La circulaire ministérielle précise en page 6 que les quinze premières zones de sécurité prioritaires « ont été prédéfinies, exceptionnellement au niveau central, en fonction de critères objectifs de gravité déterminé par la direction générale de la police nationale et la direction générale de la gendarmerie nationale. Il appartient maintenant aux préfets concernés de procéder, en lien étroit avec les procureurs de la République et les acteurs locaux, aux ajustements nécessaires en termes de périmètres, d’objectifs et d’indicateurs.

Au-delà de ces 15 premières zones, je souhaite que vous ayez un rôle déterminant dans la définition des suivantes [dans son allocution du 31 juillet face aux préfets, Manuel Valls précise qu’"Entre 50 et 60 ZSP doivent être déployées, en l’espace d’un an, à compter de septembre [et] s’appuieront sur l’expérience acquise lors de cette première phase qui doit être engagée dès la rentrée"].

Cette phase de définition devra être menée au plus près du terrain, dans le souci permanent de prendre en compte les problématiques locales d’insécurité se posant avec le plus d’acuité. »

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 Source : Le Figaro.

 

Mais l’édile niçois persiste et se scandalise : « M. Valls a choisi comme sites hautement prioritaires Méru, Vauvert, Saint-Gilles, Lunel, Mauguio, des villages qui figurent bel et bien aux côtés de véritables zones sensibles comme les Tarterêts ou le Val Fourré ». [13] On peut effectivement s’étonner, voire contester la pertinence des sites retenus. La circulaire susvisée indique, toutefois, que « De façon générale, la cartographie des ZSP ne saurait se calquer sur le zonage actuel de la politique de la ville, qui comprend environ 750 quartiers prioritaires. Bien évidemment, il n’y a aucun obstacle à ce que le ressort d’une ZSP coïncide avec celui d’une ZUS ou d’un quartier CUCS ; pour autant, les critères de la politique de la ville ne doivent pas constituer le seul argument décisif pour la création d’une ZSP » (page 6). Le Figaro est encore plus explicite : « À l'occasion de cette première sélection, Beauvau a voulu établir un échantillon représentatif des diverses formes de délinquance existant en France. Cela va de la cité sensible de banlieue tombée sous la coupe de bandes au secteur rural confronté aux cambriolages. » Il poursuit en ces termes :

 

Méru, Vauvert, Saint-Gilles, Lunel, Mauguio… Autant de villes qui ne font guère parler d'elles dans la rubrique faits divers. Pourtant ces bourgades figurent bel et bien aujourd'hui parmi les quinze zones de sécurité prioritaires au côté des Tarterêts, à Corbeil-Essonnes, et du Val-Fourré de Mantes-la-Jolie. Bien qu'épargnés par une délinquance explosive, ces lieux qui se situent en milieu rural ou périurbain, comme Méru (Oise), sont aujourd'hui considérés comme des zones sensibles. Ces coins tranquilles il y a encore plusieurs années sont en effet devenus des secteurs minés par une certaine forme d'insécurité. Avec, au premier chef, l'augmentation constante des cambriolages. Les résidences principales qui se développent dans ces communes (52 lotissements à Saint-Gilles, dans le Gard, près de Nîmes), en raison des loyers trop élevés dans les villes voisines importantes, ont rendu ces secteurs attrayants pour le voleur. Derrière la porte à fracturer, il y a dorénavant de la richesse à subtiliser… « Si on ajoute à ces cambriolages des petits trafics de drogue locaux, on obtient un phénomène symptomatique de ce qui se passe en zone gendarmerie », indique un spécialiste qui, à propos de Méru, précise : « Cette ville connaît un phénomène de cité. On y relève incivilités, trafics de drogue, économie souterraine et cambriolages. » [14]

 

Doit-on conclure que Christian Estrosi ne lit plus le quotidien de Serge Dassault ? Ce dernier fait pourtant largement écho à ses lamentations : « À Nice, ce sont les quartiers des Moulins ou de l'Ariane, régulièrement cités à la chronique des violences urbaines, qui se voient privés d'un coup de pouce sécuritaire de la part de l'Intérieur. Et la police municipale niçoise, pourtant très offensive, ne peut rien faire. La ville a signé, sous Sarkozy, une "convention de coordination" avec le préfet, qui prévoit que la police nationale a la charge exclusive de ces secteurs exposés. » C’est la reconnaissance que Nice est une ville clivée en plusieurs territoires : « le centre-ville et les quartiers résidentiels pour la municipale, et les quartiers réputés plus difficiles pour la nationale. » À Nice comme ailleurs, « La prolifération des polices municipales pose de vraies questions d’égalité des citoyens devant la sécurité ». [15]

 

Cet aveu d’abandon est d’autant plus pathétique qu’il émane du président de la commission consultative des polices municipales. Or, en tant que maire, il ne peut ignorer qu’il « concourt par son pouvoir de police à l'exercice des missions de sécurité publique et de prévention de la délinquance » (article L132-1 du Code de la sécurité intérieure) et « anime, sur le territoire de la commune, la politique de prévention de la délinquance et en coordonne la mise en œuvre » (article L132-4), présidant le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance. De même, les buts de la police municipale, énoncés à l’article L.511-1 du Code précité, ne sont-ils pas le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques ? Les agents de police municipale n’exercent-ils pas leurs fonctions sur le territoire communal dans les conditions prévues aux articles 21 et 73 du Code de procédure pénale ? Le décret n°2012-2 du 2 janvier 2012 relatif aux conventions types de coordination en matière de police municipale ne spécifie-t-il pas que « La police municipale et les forces de sécurité de l'Etat ont vocation, dans le respect de leurs compétences respectives, à intervenir sur la totalité du territoire de la commune » ? [16] Seule restriction : « En aucun cas il ne peut être confié à la police municipale de mission de maintien de l'ordre. » Pourtant, en décembre 2010, dans leur rapport sur le rôle et le positionnement des polices municipales, les inspecteurs généraux notaient qu’« À Nice par exemple, la mission a pu constater que des casques et des boucliers étaient stockés dans le coffre de certains véhicules » (page 11). D’ailleurs, depuis le décret n°2010-544 du 26 mai 2010, les agents niçois peuvent à nouveau vous électrocuter avec un pistolet à impulsions électriques, plus connu sous le nom de Taser. Ajoutez-y le flashball, le tonfa, le gaz lacrymogène et autre gel poivre, et le policier municipal de Nice dispose de la panoplie complète du parfait policier anti-émeute ! [17] 

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Source : Le Point.

Pour justifier son impuissance, le député-maire rejette la faute sur autrui et fait diversion : « Puisque l'État persiste à nous refuser des effectifs supplémentaires et que mes municipaux ne peuvent aller renforcer le dispositif, je vais créer ma propre zone de sécurité prioritaire ». Oublie-t-il vraiment que la cité azuréenne a bénéficié des prévenances sécuritaires sous les deux précédents quinquennats, donc de cette partialité qu’il dénonce aujourd’hui ? Finalement, comme dit le proverbe, il n’est pire aveugle que celui qui ne veut pas voir.



[1] Christophe Greuet, « "Les Amis de Nicolas Sarkozy", arme secrète d’Estrosi pour conquérir l’UMP » in Le Midi Libre, 20 août 2012.

http://www.midilibre.fr/2012/08/20/les-amis-de-nicolas-sa...

 

[2] V.V., « Les "amis" de sarkozy rêvent de son retour » in Le JDD, 30 mai 2012.

http://www.lejdd.fr/Politique/Actualite/Les-amis-de-Sarko...

 

[3] Mathilde Munos, « Christian Estrosi : favoriser un "livret d’épargne industrie" plutôt que le livret A » in France info, jeudi 23 août à 8 h 15.

http://www.franceinfo.fr/politique/les-invites-de-france-info/christian-estrosi-favoriser-un-livret-d-epargne-industrie-plutot-que-le-li-714419-2

 

[4] Thierry de Cabarrus, « UMP : la démagogie sécuritaire de Christian Estrosi, son seul moyen d’exister ? » in Le Plus du Nouvel Observateur, 23 août 2012.

http://leplus.nouvelobs.com/contribution/613618-ump-la-de...

 

[5] Rapport n°508 du 18 décembre 2002 fait par Christian Estrosi sur le projet de loi pour lasécurité intérieure, 2e partie, page 34.

http://www.assemblee-nationale.fr/12/rapports/r0508.asp

 

[6] Coïncidence, on retrouve le même jour ces témoignages dans les colonnes du quotidien local Nice-Matin.

Lionel Paoli, « Des agents de sécurité privés aux Moulins : Vous croyez que ça va tout résoudre ? » in Nice-Matin, jeudi 23 août 2012.

http://www.nicematin.com/nice/des-agents-de-securite-prives-aux-moulins-vous-croyez-que-ca-va-tout-resoudre.969404.html

 

[7] Laurent Opsomer, « Police municipale de Nice » in Double Neuf, 3 juin 2011.

http://doubleneuf.nordblogs.com/archive/2011/06/03/police-municipale-de-nice-discours-de-christian-estrosi-du-s.html

 

[8] Rapport n°508 du 18 décembre 2002 fait par Christian Estrosi sur le projet de loi pour lasécurité intérieure.

http://www.assemblee-nationale.fr/12/rapports/r0508.asp

 

[9] « Dossier : Sarkozy contre "la racaille", le bilan » in Marianne, dimanche 22 janvier 2012.

http://www.marianne2.fr/Dossier-Sarkozy-contre-la-racaille--le-bilan_a214638.html

 

[10] Laurent Mucchielli, « L’image de la police continue de se dégrader en France » in Vous avez dit sécurité ?, 5 juillet 2012.

http://insecurite.blog.lemonde.fr/2012/07/05/limage-de-la-police-continue-de-se-degrader-en-france/

 

[11] « Pour l’UMP locale, après l’affaire Merah, la ville doit faire partie des premières ZSP » in La Dépêche du Midi, 6 août 2012.

http://www.ladepeche.fr/article/2012/08/06/1414059-pour-l-ump-locale-apres-l-affaire-merah-la-ville-doit-faire-partie-des-premieres-zsp.html

 

[12] Hervé Jouanneau, « Zones de sécurité prioritaires : la liste des villes retenues, la réaction des élus » in La Gazette des communes, 6 août 2012.

http://www.lagazettedescommunes.com/125825/zones-de-securite-prioritaires-la-liste-des-villes-retenues-la-reaction-des-elus/

 

Ivan Valerio, « Zones de sécurité prioritaire : les villes divisées » in Le Lab, 7 août 2012.

http://lelab.europe1.fr/t/zones-de-securite-prioritaire-les-villes-divisees-4221

 

[13] Jean-Marc Leclerc, « Les zones de sécurité de Valls contestées » in Le Figaro, 24 août 2012.

http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2012/08/24/01016-20120824ARTFIG00456-les-zones-de-securite-de-valls-contestees.php

 

[14] Angélique Négroni, « Zones de sécurité prioritaires : le difficile pari de Manuel Valls » in Le Figaro, 6 août 2012.

http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2012/08/05/01016-20120805ARTFIG00195-zones-de-securite-prioritaires-le-difficile-pari-de-manuel-valls.php

 

[15] « Polices municipales. Et urne de plus » in Les dossiers du Canard enchaîné n°71, Que fait la police ?, avril 1999, page 74.

 

[16] En tant que président de la commission consultative des polices municipales, Christian Estrosi s’était félicité dans un communiqué « de ces premières avancées », assurant que ce décret « est une première étape dans le renforcement de l'action des polices municipales ». Cette nouvelle convention de coordination vise, en effet, une coopération opérationnelle renforcée entre la police municipale de Nice, par exemple, et les forces de sécurité de l’État (article 15). D’ailleurs, l’article 11 prévoit que « Le responsable des forces de sécurité de l'Etat et le responsable de la police municipale peuvent décider que des missions pourront être effectuées en commun sous l'autorité fonctionnelle du responsable des forces de sécurité de l'Etat, ou de son représentant. Le maire en est systématiquement informé. » L’article 16 précise qu’« En conséquence, les forces de sécurité de l'Etat et la police municipale amplifient leur coopération dans les domaines [comme] la vidéoprotection par la rédaction des modalités d'interventions consécutives à la saisine des forces de sécurité intérieure par un centre de supervision urbaine et d'accès aux images [ou] la prévention des violences urbaines et de la coordination des actions en situation de crise. » Enfin, au vu de l’article 17, le maire peut « renforcer l'action de la police municipale par les moyens suivants » : brigade cynophile, brigade à cheval…

Ce décret répond aux vœux d’une poignée de shérifs, cette minorité de maires répressifs auxquels les inspecteurs généraux font allusion à plusieurs reprises. Ils évoquent ainsi ces élus qui affichent « une volonté d’accroître le domaine de compétence de leur police municipale » (page 23) ou lorsqu’ils notent qu’« À l’exception de quelques maires du Sud-Est, [les édiles] ne sont pas demandeurs d’un élargissement supplémentaire des compétences judiciaires des policiers municipaux, position exprimée aussi par les administrations centrales consultées par la mission » (page 42). D’ailleurs, est-ce un hasard s’ils précisent « que les cas de mise en œuvre des nouvelles conventions ne concerneront qu’un nombre limité de communes parmi celles qui avaient signé une convention de coordination de première génération » (page 46) ?

 

[17] Ségolène de Larquier, « À Nice, Christian Estrosi chouchoute ses policiers municipaux » in Le Point, 31 mai 2010.

http://www.lepoint.fr/societe/a-nice-christian-estrosi-ch...

22/06/2011

POLICES MUNICIPALES : LA SALADE NIÇOISE

nice,police municipale,claude guéant,christian estrosiLa montagne a accouché d’une souris, telle est la conclusion des premières rencontres de la police municipale organisées à Nice, jeudi 16 juin 2011, sous la présidence de Claude Guéant, ministre de l’Intérieur. D’ailleurs, comment aurait-il pu en être autrement puisque l’intitulé même de cette manifestation était déjà erroné ! Il y avait, en effet, eu un précédent avec les premières assises nationales des polices municipales organisées à Châlons-sur-Saône le mardi 20 septembre 2005.

Présenté comme la grand-messe de la police municipale [1], le symposium niçois a sombré dans le burlesque, la fadaise rivalisant avec la galéjade. Hâbleur, le député-maire UMP de la cité azuréenne, Christian Estrosi, a, néanmoins, reconnu que « Cette action n’est pas neutre, elle rentre dans le cadre de la volonté présidentielle » [2]. Sous la plume de Jean-Marc Leclerc, Le Figaro surenchérit : « Le député maire UMP de Nice, Christian Estrosi, offrira jeudi dans sa ville une tribune de choix au ministre de l’intérieur qui doit présider les premières Rencontres nationales de la police municipale » [3]. Il est vrai, comme l’écrit pertinemment Eric Nunès, que « Pour le ministre de l’Intérieur, l’occasion est belle, à un an de l’élection présidentielle, d’opérer une tentative de rapprochement avec 18 000 policiers et une dizaine de milliers d’agents de surveillance [donc d’électeurs potentiels], autant d’acteurs des forces de proximité qui, depuis plusieurs années, s’estiment en manque de reconnaissance » [4]. D’ailleurs, le quotidien Nice Matin titre dans son édition du 17 juin 2011 : « Nice : Guéant en précampagne ». Las, aussi fidèle soit-il, Claude Guéant n’est pas Nicolas Sarkozy : il n’a ni la verve, ni le charisme de son champion, et cette opération de communication politique a tourné, au final, au naufrage, échouant sur le double écueil de l’armement et du volet social.  

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L’UMP et certaines organisations syndicales de police municipale n’avaient pourtant pas ménagé leurs efforts au cours des semaines précédentes ! Ainsi, se congratulant mutuellement, Christian Estrosi et Frédéric Foncel, agent territorial à Cannes et président du Syndicat national des policiers municipaux (SNPM-CFTC), ont présenté conjointement l’initiative du maire de Nice lors d’une conférence de presse à Paris le 17 mai 2001 [5]. D’ailleurs, le SNPM se félicite d’avoir été reçu par l’UMP [6] et même à l’ÉLYSÉE [7] ! De son côté, le Syndicat de défense des policiers municipaux (SDPM) encense Jean-Paul Garraud [8]. Député de la Gironde, cet ancien magistrat est l’un des membres fondateurs du collectif de la droite populaire et secrétaire national de l'UMP délégué à la Justice, pilier du noyau dur de la droite, réputé proche du pouvoir. A l’instar de Patrick Balkany [9], député-maire UMP de Levallois-Perret, ou d’Eric Ciotti, député UMP des Alpes-Maritimes et rapporteur de la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (plus connue sous l’acronyme Loppsi 2), Jean-Paul Garraud réclame davantage de pouvoirs pour les policiers municipaux ; il souhaite voir les directeurs de police municipale passer OPJ (officiers de police judiciaire) et les policiers municipaux APJ (agents de police judiciaire) [10]. Il promeut également la création d’une police territoriale [11] et c’est dans cette perspective que l’a rencontré Cédric Michel, président du SDPM [12]. Ce projet est d’ailleurs jugé « très intéressant » et allant « dans le bon sens » par le Syndicat indépendant de la police municipale [13] (SIPM), affilié à la Fédération professionnelle indépendante de la police (FPIP), qui s’était déjà positionné à ce propos [14]. Tandis que « Guéant et Estrosi vantent la police municipale » [15], Bruno Beschizza, secrétaire national de l'UMP chargé de l'emploi des forces de sécurité, affirme dans Le Figaro que « Le port d'arme pourrait devenir la règle » [16]. La presse s’emballe à son tour et les titres fleurissent à foison : « Guéant au chevet de la police municipale », annonce Europe 1. « La police municipale en mal de reconnaissance », déplore Nice Matin. Même plainte au Figaro : « Les policiers municipaux en quête de reconnaissance ». « Les polices municipales vont être musclées », écrit de son côté Joel Cossardeaux dans Les Echos, tandis que le journal L’Alsace déclare que « Le gouvernement serait prêt à armer les 20 000 policiers municipaux » et que La Dépêche du Midi s’interroge : « Faut-il armer la police municipale ? » La question ne se pose même pas pour Le Figaro : « Guéant va renforcer l’arsenal des polices municipales » ! 

Cependant, dans ce concert panégyrique, une voix manque à l’appel ou est inaudible : celle de Jean-Claude Bouchet, député-maire UMP de Cavaillon, pourtant intronisé secrétaire national de l’UMP (un de plus !) en charge des polices municipales [17] par Jean-François Copé, poste qui devait lui permettre « de mieux appréhender au niveau national les attentes et besoins de la profession » (sic).

MISE EN DEMEURE ET FIN DE NON-RECEVOIR 

nice,police municipale,claude guéant,christian estrosiNéanmoins, les esprits s’échauffent tant l’irruption semble imminente : le Big One tant espéré se profile pour la profession ! L’ébullition est telle que Frédéric Foncel, président du SNPM-CFTC, adresse une véhémente mise en demeure au président de l’AMF (Association des maires de France) [18], Jacques Pélissard, député-maire UMP de Lons-le-Saunier dans le Jura. Certain d’avoir « des alliés tant politiques que spécialistes ou homologues » [19], il énonce ses exigences (notamment gilet pare-balles et armement de 4ème catégorie individuels et obligatoires, ISF automatique et portée au taux maximum pour tous les agents de police municipale, relèvement de l’indice terminal de la catégorie C, intégration des primes dans le calcul des droits à la retraite des policiers municipaux) sous la forme d’un ultimatum : « Monsieur le Président, nous mettons en demeure l’AMF de réviser ses réflexions, (non pas dans 6 mois, un an ou aux calendres grecques, mais immédiatement) sur la police municipale et sur les personnels qui la composent. […] nous osons espérer que le jeudi 16 juin 2011 à Nice, lors des Premières Rencontres Nationales de la Police Municipale organisées par Monsieur le Député-maire Christian ESTROSI, vous abonderez entièrement dans le sens des propositions de notre organisation syndicale qui ont vivement retenu l’attention de nombreux Maires et élus de tous bords. » Et le président du SNPM conclue sur un ton aigre-doux, voire menaçant : « Monsieur le Président, rappelez-vous que les policiers municipaux "de la France d’en bas" sont des fonctionnaires territoriaux et que dans l'avenir ils occuperont toujours leur poste… Ce qui n’est pas garanti pour tout élu quel qu’il soit, notamment les parlementaires !!! » Le président de l’AMF en tremble encore…

 

Alors que la tension semble avoir atteint son paroxysme, le SDPM remarque, non sans ironie, que « Certains adressent des "mises en demeure" qui certainement font trembler leurs destinataires (!!!), surtout que l'on ne voit pas très bien quels sont leurs recours en cas de non réponse, ou de refus... Pendant ce temps, le SDPM ne brasse pas de l'air : il démontre, une fois de plus, qu'il est le seul à réellement travailler en faveur des policiers municipaux, avec des actions concrètes. » [20]

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On connaît la suite. Cependant,le SNPM n’en est pas à son coup d’essai. Ainsi, au mois de mars 2010, pouvait-on lire dans les colonnes du quotidien L’Union : « La municipalité [de Château-Thierry] est "mise en demeure de faire immédiatement supprimer l'appellation « police rurale » du service représenté par (votre) garde champêtre." L'injonction vient du SNPM-CFTC, le syndicat national des policiers municipaux. Ce dernier ne reconnaît pas la dénomination de « police rurale » qu'arbore fièrement Noël Scherrer, sur sa tenue de garde champêtre. […] Les représentants syndicaux de la police municipale militent pour la fusion des cadres d'emploi. Ils ont bien conscience que les villes de moyenne importance comme Château-Thierry, optent pour la création de postes de garde champêtre plutôt que d'une police municipale pour des raisons financières. » [21]

 

Par conséquent, beaucoup ont dû s’étrangler de rage ou d’indignation quand « quelques gardes champêtres (quatre) en tenue d’uniforme [ont gravi] les marches du Palais des congrès de Nice, avec une haie d’honneur d’agents de la Police municipale, moment d’émotion mais aussi de fierté » (dixit Paul Chevrier, garde champêtre de Valberg et Secrétaire général du Syndicat national autonome des gardes champêtres contemporains ou SNAGCC), d’autant qu’en aparté, le général de division David Galtier, de la DGGN, leur assura son soutien en ces termes : « Continuez ! La Gendarmerie a besoin des gardes champêtres ! » [22]


[1] Renato Ferrari, « 1res Rencontres Nationales de la Police Municipale à Nice : un vaste chantier de débats » in Nice Premium, 18 mai 2011.
 
[2] Antoine Kowalski, « Police municipale : Estrosi veut faire école » in France Soir, 15 juin 2011.
 
[3] Jean-Marc Leclerc, « Guéant va renforcer l’arsenal des polices municipales » in Le
Figaro, 15 juin 2011.
 
[4] Eric Nunès, « L’UMP réfléchit au statut du policier municipal » in Le Monde, 16 juin 2011.
 
 
[6] SNPM, « Le Syndicat national des policiers municipaux reçu par l’UMP » in Le Post, 9 juin 2011.
 
[7] SNPM, « Le Syndicat National des Policiers Municipaux a été reçu à l’Elysée » in Le Post, 18 juin 2011.
 
[8] SDPM, « Police municipale : le SDPM s’engage pour la création de la police territoriale »in Le Post, 11 juin 2011.
 
[9] Laurent Opsomer, « Brève histoire de la police » in Double Neuf, 17 juin 2011.
 
[10] SDPM, « La police municipale transformée en police territoriale ? » in Analyse sur la sécurité urbaine, 12 juin 2011.
 
[11] Dans son Rapport sur le rôle et le positionnement des polices municipales, l’IGA (Inspection générale de l’administration) évoque la création d’un « corps » de police municipale (page 32), notant que « dans ce domaine, si toutes les formations syndicales sont sensibles au besoin de reconnaissance des polices municipales, il y a, malgré tout, des degrés différents dans la volonté d’intégration. Le premier degré correspond, pour la majorité des syndicats, à la rédaction d’une doctrine nationale d’emploi en restant dans le cadre de la fonction publique territoriale. […] Enfin, une minorité milite pour la création d’une véritable police "territoriale" autonome proche des deux forces de sécurité actuelles ». 
 
[12] SDPM, « Le SDPM rencontre le secrétaire nationale de l’UMP à la justice pour créer la police territoriale », 10 juin 2011.
 
[13] SIPM, « Vers la police territoriale ? », 13 juin 2011.
 
[14] SIPM, « Créer la police territoriale, l’indispensable réforme », date non précisée.
 
[15] Benoît Vittek et Antoine Kowalski, « Guéant et Estrosi vantent la police municipale » in France Soir, 15 juin 2011.
 
[16] Jean-Marc Leclerc, « Beschizza : "Le port d'arme pourrait devenir la règle" » in Le Figaro, 14 juin 2011.
 
[17] « Nomination de Jean-Claude BOUCHET Secrétaire National UMP en charge des Polices Municipales » in blog de Jean-Claude Bouchet, député UMP du Vaucluse, 16 février 2011.
 
[18] SNPM, « Le Syndicat national des policiers municipaux met en demeure le président de l'Association des maires de France » in Le Post, 10 juin 2011.
[19] SNPM, « Communiqué SNPM du 14 juin 2011 » in Le Post, 14 juin 2011.
 
[20] SDPM, « Le Député Jean-Paul GARRAUD s'engage aux côtés du syndicat professionnel de la police municipale » in Le Post, 11 juin 2011.
 
[21] Isabel Da Silva, « Le syndicat de la police municipale indigné Le garde champêtre hors la loi ? » in L’Union, 13 mars 2010.
 
[22] Police rurale de Valberg (Alpes-Maritimes)
 
SNAGCC Entente de Police rurale

03/06/2011

POLICE MUNICIPALE DE NICE

Discours de Christian Estrosi du samedi 12 février 2011 [1]

Petite analyse personnelle

 

Le culte du chiffre

 

Christian Estrosi a le culte du chiffre : « 355 policiers municipaux, et 380 d’ici la fin de l’année, 150 ASVP », annonce-t-il fièrement pour la police municipale niçoise, sa police. Soit un ratio d’un ASVP pour deux agents de police municipale (APM). Si j’en crois le rapport de la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte-d’Azur sur la gestion de la ville de Cagnes-sur-Mer, publié en octobre 2010, le recours de plus en plus important aux ASVP sert aux communes du littoral azuréen à pallier les difficultés de recrutement ou sert de variable d’ajustement en matière de gestion des personnels de la police municipale (« la période estivale entraîne un regain d’activité de la police municipale alors que ses effectifs sont diminués du fait des congés »).

 

A ses côtés, Benoît Kandel, le « Monsieur Sécurité » de Nice. Je m’interroge à propos de cet ancien colonel de gendarmerie que Christian Estrosi aime à présenter en ces termes : « plus qu'un super-patron de la police municipale, […] une sorte de ministre de l'intérieur municipal » (J.-F.R., « Nice : Christian Estrosi présente son "Monsieur Sécurité" » in Nice Matin, mercredi 16 janvier 2008). Benoît Kandel a été nommé au poste d’adjoint à la sécurité. Mais au vu de la taille de la police municipale niçoise, qui le seconde ? Un directeur de police municipale ou un cadre de catégorie A ou un agent non titulaire ?

La hiérarchie de la police municipale de Nice m’intrigue, mais mon questionnement importe peu en vérité puisqu’au vu de l’arrêt n°300521 du Conseil d’Etat en date du mercredi 19 novembre 2008 concernant la commune de Saint-Paul-de-la Réunion, un agent de catégorie A peut être nommé en qualité de directeur de la sécurité publique, donc diriger un service de police municipale, ce qu’a confirmé l’an dernier le ministère de l’Intérieur dans sa réponse (tardive) à la question n°25929 de Michel Terrot, député UMP du Rhône [2].

Cela dit, la chambre des comptes régionale de PACA [3] « a constaté que la ville semblait rencontrer des difficultés pour recruter des agents de la fonction publique territoriale sur des emplois statutaires tels que directeur du centre du patrimoine, responsable de l’organisation du travail et des relations sociales, directeur des affaires culturelles, directeur de territoire, directeur de l’événementiel, directeur de la communication ou directeur de la mission politique de la ville. Ces emplois ont été pourvus par des agents non titulaires. Il ne peut s’agir que d’une exception au principe posé par les dispositions de l’article 2 de la loi statutaire du 26 janvier 1984 selon lesquelles les emplois permanents sont occupés par des fonctionnaires [publics territoriaux]. La collectivité qui a justifié avoir respecté les conditions de recherche préalable d’un candidat fonctionnaire, par une publicité adaptée, a précisé que selon elle, le niveau des candidats était trop souvent en dessous de ce que l’on était en droit d’attendre de candidats à des emplois de catégorie A ou de hauts fonctionnaires territoriaux. »

 

Vient ensuite un couplet flagorneur à l’attention des agents présents, du Sarkozy pur jus ! Un style qui ne se renouvelle guère en réalité. Voici ce que Christian Estrosi avait déclaré lors de son premiers discours [4], le vendredi 21 mars 2008, à la police municipale niçoise réunie : « Je l'annonce avec une certaine solennité et une certaine gravité pour que chacun me comprenne bien : le recrutement, l'avancement et les récompenses au sein de notre police municipale seront désormais examinés sur les seuls critères du mérite, du travail, des compétences et de l'engagement personnel. […] je veillerai à ce que tous les moyens nécessaires à l'accomplissement de votre mission vous soient accordés, que ce soit en termes d'équipement, d'armement, de vidéosurveillance, de cartographie numérique ou encore de véhicules. Dans ce domaine, je veux l'excellence pour Nice et je souhaite que nous devenions un modèle. […] Votre choix de vie est clair: vous avez librement décidé de servir la collectivité en devenant policier municipal. Ce choix vous honore. Ma considération et mon respect vous sont acquis.», ajoutant : «Je veux des policiers municipaux professionnels, bien dans leur peau et fiers de servir leur ville. »

 

Christian Estrosi rend un hommage appuyé aux dix agents niçois blessés au cours de l’année 2010. Dix agents blessés, soit ! Mais blessés suite à une agression, à un accident ? D’ailleurs, quel est le degré de gravité des blessures ? C’est aussi un chiffre qu’il faut relativiser : 10 blessés pour 82 000 interventions revendiquées. 10 blessés sur 355 APM, soit 2,80 %, un pourcentage qui tombe à 1,67 % si l’on prend en compte l’intégralité des effectifs de la police municipale niçoise (600) car on ignore le statut des personnels évoqués : APM ou ASVP ? Dans le second cas, titulaires ou contractuels ? Un chiffre à comparer, enfin, avec ceux de la police et de la gendarmerie nationale [5].

 

250 armes à feu

 

Christian Estrosi évoque ensuite l’armement de sa police : 20 Tasers, 10 Flashballs, 30 nouvelles armes de poing, précisant « ce qui porte à 250 le nombre d’armes à feu de 4ème catégorie à votre disposition ».

Cette remarque a tout de suite retenu mon attention. 250 armes à feu. Je suppose qu’il ne compte pas les 20 pistolets à impulsions électriques dans ce total. Par contre, je suis moins catégorique pour les 10 flashballs, qui sont, selon leur type, classés en 4ème ou 7ème catégorie, néanmoins, je les exclue du total pour simplifier. Donc 250 armes à feu revendiquées pour… « 355 policiers municipaux, et 380 d’ici la fin de l’année ». Deux conclusions sont alors possibles :

 

-          soit que tous les APM niçois ne sont pas armés, ce qui expliquerait pourquoi le député-maire de Nice ne figure pas parmi les signataires de la proposition de loi visant à généraliser le port d’armes des policiers municipaux déposée par son ami, l’inénarrable Patrick Balkany, député-maire de Levallois-Perret, dont la gestion municipale est un modèle [6]. Mais cette explication est alors en contradiction avec le ton martial du discours présent (et des précédents) puisqu’il déclare un peu plus loin : « A Nice, vous êtes armés. Vous êtes armés car je me refuse à vous laisser désarmés, à la merci de la violence. »

-          Soit les APM niçois partagent leurs armes. Les Flashballs sont généralement considérés comme des armes collectives, faut-il, cependant, en conclure que ce ne sont pas toujours les mêmes agents qui en disposent ? Dans l’affirmative, cela constitue un danger à la fois pour le fonctionnaire et pour la victime éventuelle. En effet, malgré les séances de tir annuelles obligatoires, comment se familiariser au quotidien avec cette arme spécifique si l’agent n’en dispose pas habituellement, s’il y a un roulement dans la dotation ? Mais ce qui est inquiétant pour le Flashball devient angoissant pour les armes de poing ! L’APM ne peut, en effet, régler l’arme à sa guise puisque ce n’est pas son arme : c’est donc une arme à laquelle il doit s’adapter et non l’inverse, d’où un danger potentiel.

 

Christian Estrosi met en avant des moyens de protection renforcés avec « la mise en service de 55 gilets pare-balles et bientôt de 33 autres », soit 88 au total. Comment faut-il interpréter ces chiffres : dotation initiale, partielle (au bénéfice des équipes de nuit) ou complémentaire (tous les autres APM en étant déjà dotés) ?

 

Autre caractéristique des polices municipales des villes du littoral azuréen (cf. à ce sujet le rapport de la chambre régionale des comptes de PACA à propos de la politique de sécurité de la commune d’Aix-en Provence) : la création de brigades spécialisées.

 

Vient ensuite son bébé : le CSU dont il dresse le bilan. « Avec 624 caméras, nous avons pu réaliser en moins d’un an 230 réquisitions judiciaires et 260 interpellations (une de plus cette nuit même suite à une tentative d’agression contre des pompiers). » Nous sommes priés de le croire mais je ne peux m’empêcher de me questionner : sur les 230 réquisitions judiciaires, combien ont réellement été utiles, c’est-à-dire ont permis la conclusion d’une enquête ? 260 interpellations ? De quelle nature ? 324 caméras, soit une pour 600 habitants, ce qui fait de Nice la ville la plus surveillée de France mais pas la plus sûre, au contraire ! Enfin, ce chiffre de 624 caméras fait écho au magazine Science & Vie d'avril 2010, qui a publié un article intitulé « Le bluff de la vidéosurveillance ». Voici son introduction : « Censées lutter contre la délinquance, les caméras de surveillance prolifèrent dans l'Hexagone. Or, le flot d'images qu'elles diffusent est humainement impossible à regarder ! Et l'analyse automatique reste expérimentale.» Avec 624 caméras, on est donc au-delà de l’humain, dans l’inhumain suis-je tenté d’écrire. Mais notre député-maire fanfaronne tout en passant sciemment sous silence le coût de son bébé, qui emploiera au final une cinquantaine d’agents, dont 10 travailleurs handicapés : 7,6 millions d’euros d’investissement, dont 6,4 pour la ville de Nice et 1,2 pour la communauté urbaine Nice Côte d’Azur, auxquels il faut ajouter une participation du Conseil général des Alpes-Maritimes pour 1,1 million, soit un total de 8,7 M€. Je me demande si la chambre régionale des comptes de PACA vérifiera un jour les conditions d’attribution de ces juteux contrats [7], si quelqu’un saisira la chambre régionale des comptes à ce propos, comme le permet l'article R.1612-35 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) ? Cela dit, on comprend mieux l’orientation répressive résolument prise avec la vidéoverbalisation. Si la vidéosurveillance, pardon vidéoprotection, est un leurre, la vidéoverbalisation est une réalité ! Si les caméras sont inefficaces pour traquer les délinquants, malgré la propagande officielle, elles sont, par contre, redoutables pour les automobilistes ! Il faut bien rentabiliser l’investissement, me direz-vous.

Christian Estrosi est également muet à propos de la formation (ou l’absence de formation ?) des opérateurs vidéos. Je me permets ici de faire écho aux réflexions d'Emilie Thérouin, adjointe à la sécurité de la ville d'Amiens. Celle-ci remarque que « L'opérateur vidéo est bien le parent pauvre de l'agitation qui existe autour de la vidéosurveillance. Beaucoup s'évertuent à disserter sur l'importance de l'outil vidéo, mais qui pour "penser" aux opérateurs ? [...] Pourtant, Opérateur vidéo reste un métier de l'ombre, non reconnu par le législateur qui, pourtant, est friand de légiférer sur la sécurité et son dada, la vidéosurveillance. Mais le CNFPT est lui aussi très en retard sur les métiers de la sécurité. Ainsi, il n'existe pas de formation initiale commune, encore moins un plan de formation continue obligatoire pour les opérateurs vidéo. Chaque ville bricole dans son coin avec le recrutement, la formation, la déontologie. Seul le double agrément préfecture/procureur est exigé. L'opérateur peut être un ASVP, agent technique qui ne dépend pas de la filière sécurité, ou encore un agent administratif. » [8]

Pour clore sur ce chapitre de la vidéosurveillance, je reprends à mon compte les propos d’Yves Chastan, sénateur-maire de Privas, pour lequel « La vidéosurveillance est un pis-aller » puisque « ce type de système ne s'attaque pas aux causes réelles de la délinquance que sont le délitement de la société, le chômage de masse depuis quinze ou vingt ans, et l'apologie de l'individualisme et de l'argent facile et vite gagné » (L’Essor n°430 de décembre 2010).

 

Christian Estrosi annonce fièrement une augmentation de 30 % des effectifs de sa police municipale, ce qui se traduit concrètement pour la ville par « un effort financier de 6 millions d’euros obtenus par une plus grand maîtrise de nos dépenses de fonctionnement ». La gestion de Christian Estrosi n’a pas été évaluée par la chambre des comptes régionale de PACA à la différence de celle de son prédécesseur, Jacques Peyrat, sénateur-maire. Dans le rapport de 2007, on apprend que le budget principal de la ville de Nice pour 2004 « représentait plus de 570 M€ en fonctionnement et près de 380 M€ en investissement, soit un total proche d’un milliard d’euros. » On découvre aussi que Nice n’a rien à envier à la gestion de Levallois-Perret : « La chambre a constaté que la ville de Nice avait continué à honorer des échéances d’emprunt pour des organismes défaillants auxquelles elle avait apporté sa garantie. […] Six dossiers ont particulièrement retenu l’attention de la juridiction. […] En conclusion, si les faits évoqués supra résultent d’une politique municipale différente de celle conduite aujourd’hui, il demeure que l’ensemble des défaillances des organismes auxquels la ville avait accordé sa garantie lui a coûté plus de 51 M€. » Une somme que la municipalité n’a apparemment pas provisionnée en dépit des risques avérés. Cependant, la ville de Nice est riche, d’où une remarquable capacité d’autofinancement, qui limite de fait l’endettement. Toutefois, « la chambre considère que la situation financière apparemment convenable ne devrait pas masquer la perspective, à partir de 2006, d’un accroissement de l’endettement de la ville sous l’effet de dépenses d’équipement évaluées à 240 M€ pour les deux années 2007 et 2008. En effet, à périmètre budgétaire identique, ces dépenses ne pourront vraisemblablement pas être couvertes par un autofinancement supérieur à 50 M€ par an, sauf à actionner le levier fiscal, à comprimer les dépenses de fonctionnement ou à dégager des ressources financières nouvelles. » En outre, à l’époque, la chambre des comptes régionale n’a pas pris en compte les conséquences de la crise financière en gestation.

 

La ville de Nice apporte un important concours financier au secteur associatif. « Entre 1999 et 2003, le nombre d’organismes subventionnés par la ville de Nice a été en moyenne de 900. En 2004, on ne dénombrait plus que 600 associations subventionnées. Durant cette période, la ville a consacré plus de 140 M€ au secteur associatif, ce qui a représenté, chaque année, près de 5 % de ses dépenses totales de fonctionnement. » Parmi les bénéficiaires de la générosité municipale, la vénérable Archiconfrérie de la Sainte-Croix de Nice, plus communément connue sous le nom de « pénitents blancs », en raison de la couleur de la cape portée par ses membres [9]. Malgré les vents mauvais qui vont très prochainement déferler sur la laïcité, je ne vais pas m’attarder sur le lobby catholique mais je signale l’enquête de Marc Baudriller publiée en 2008 chez Robert Laffont : « Les réseaux cathos »... apparemment aussi actifs à Nice qu’à l’Elysée, suis-je, néanmoins, tenté d’ajouter. Christian Estrosi leur fait peut-être même indirectement un clin d’œil en affirmant que « Cette volonté de dévouement, cette préoccupation du service sont des vertus devenues rares. »

 

Un policier municipal pour 610 habitants ?

 

Christian Estrosi se lance ensuite dans une audacieuse comparaison pour mieux glorifier son action : « Cet effort financier, humain, que je maintiens et que je développe, est unique en France. Savez-vous qu’à Toulouse, la police municipale ne travaille pas la nuit ? Savez-vous qu’à Marseille, elle n’est pas armée ? A Marseille ! Savez-vous qu’à Lyon, il y a 1 policier municipal pour 1439 habitants ? Eh bien à Nice, il y a un policier municipal pour 610 habitants. » Peu lui importe que la police municipale ne soit pas la police nationale, encore moins que ses prérogatives lui imposent des missions différentes, Christian Estrosi assume la confusion des casquettes, la revendique même ! Il assène avec force son ratio : un policier municipal pour 610 habitants ! Un policier municipal pour 610 habitants ? La population niçoise est estimée à 338 219 habitants pour 2010, donc en hausse, même si elle n’atteint pas encore le maximum établi en 1975 avec le chiffre record de 344 481, et surtout vieillissante. Cela dit, pour parvenir au coefficient avancé par Christian Estrosi, il faut nécessairement et volontairement faire l’amalgame de l’ensemble des personnels affectés au service de police municipale, à savoir : « 355 policiers municipaux, et 380 d’ici la fin de l’année, 150 ASVP, qui assistent les policiers municipaux sur la voie publique, et 70 personnels administratifs indispensables au fonctionnement quotidien et logistique de la Direction. » Or, comme l’a rappelé à bon escient le rapport de l’IGA sur les polices municipales, un ASVP n’est pas un APM ! Celui-ci ne peut se voir confier des missions de sécurité publique (cf. circulaire INT/D/05/00024/C du 15 février 2005). En tant qu'ASVP, leur compétence se limite strictement à constater les infractions aux règles relatives à l'arrêt et au stationnement des véhicules [10]. Toutefois, si la ville de Nice arrive à l’effectif de 380 APM, le ratio sera d’un APM pour 890 habitants, ce qui n’est pas négligeable. Finalement, Christian Estrosi s’inscrit dans la lignée de son prédécesseur et concurrent, pour ne pas dire ennemi. La chambre avait, en effet, noté à propos des effectifs municipaux que « Les charges brutes de personnel ont conservé, de 1999 à 2003, un niveau identique d’environ 220 M€ par an pour atteindre 232 M€ en 2004, alors pourtant que la création de la communauté d’agglomération, en 2002, a été accompagnée d’un transfert de 460 agents de la ville dont 422 agents titulaires. […] Elles absorbaient environ 46 % des dépenses totales de fonctionnement de l’année 2004 et étaient nettement supérieures au produit de la fiscalité directe des trois taxes, soit 184 M€. ». Autre remarque de la juridiction financière : le cabinet du maire mobilisait « plus de 4 % de l’effectif total de la collectivité ce qui est important pour une ville de la taille de Nice. » Qu’en est-il aujourd’hui ?

 

Chose rare à relever : Christian Estrosi se félicite du dialogue constructif avec les syndicats, encensant notamment l’action des délégués syndicaux de FO, de la CGT et du SNPM-CFTC ; son mutisme à l’endroit d’autres organisations syndicales est éloquent[11]. Le député-maire déclare, en effet, « A Nice, vous travaillez 24h sur 24. Vous travaillez 24h sur 24 car, avec vos représentants syndicats, que je remercie et que je salue avec gratitude aujourd’hui, nous avons pu trouver des aménagements d’horaires convenables pour vous permettre d’assurer votre mission. » Il faut dire que la ville de Nice a une culture du dialogue social et une gestion des ressources humaines, qui ont étonné jusqu’à la chambre régionale des comptes de PACA ! Cette dernière a ainsi constaté que « Chaque direction des services municipaux doit définir, par unité de travail, la formule horaire la mieux adaptée à son organisation et ses contraintes fonctionnelles ». Dès lors, « chaque service est libre de son choix », d’où « une diversité des horaires de travail ». La gestion des heures supplémentaires a également interpellé la juridiction financière, qui note dans son rapport de 2007 que « L’examen des volumes d’heures supplémentaires accordés aux agents, notamment au service du nettoiement et au cabinet, a conduit la chambre à s’interroger sur les modalités de leur gestion qui suscitent plusieurs observations. » Elle signale, par exemple, que « des agents pouvaient bénéficier d’heures supplémentaires, attestées par des chefs de service distincts, pour une même date, à un même horaire et pour deux lieux d’exécution différents. »

 

Le député-maire défend l’action de sa police : « Depuis septembre 2010, nos 8 équipes d’îlotiers ont déjà plus de 4000 prises de contact, dans le secteur de la ville que nous avons choisi comme terrain d’expérience, c’est-à-dire nos quartiers nord. » 4 000 prises de contact depuis septembre 2010 ? Un rapide calcul permet de conclure à moins de six contacts par jour et par équipe [12], ce qui est particulièrement faible. Cela n’empêche nullement Christian Estrosi de défendre l’îlotage, donc la police de proximité pourtant vouée aux gémonies par Nicolas Sarkozy, qui, ministre de l’Intérieur, assénait, le 4 février 2003, à Toulouse, que « La police de proximité est là pour prévenir mais si elle est faite au détriment du travail d'investigation et d'interpellation, elle ne sert à rien... », ajoutant avec ironie : « Je ne peux pas croire qu'ici les délinquants soient plus difficiles à interpeller. Ici, il n'y a pas de problèmes de moyens, mais de priorité » ! « Vous n'êtes pas des travailleurs sociaux », avait-il lancé à un îlotier qui lui présentait, sur ordre des conseillers de Sarkozy, un tournoi de football organisé avec les jeunes du quartier. « Les citoyens attendent d'abord de vous que vous arrêtiez les délinquants ». Or, voici que son féal niçois veut « étendre à la cité toute entière, à tous ses quartiers, même les plus difficiles, cette action exemplaire qu’est l’îlotage » ! Pis, le vassal argumente en ce sens :

 

L’îlotage, c’est plus de connaissance de terrain et des hommes.

L’îlotage, c’est une source de renseignement complémentaire pour interpeller plus vite, plus précisément, plus efficacement.

L’îlotage, c’est plus d’humanité et de compréhension des habitants et des problématiques des quartiers.

 

Mais hier comme aujourd’hui, l’ancien ministre de l’Intérieur peut toujours rétorquer à son homme lige que «Pour faire ce travail (garantir la sécurité dans les quartiers sensibles), il ne suffit pas de poster un policier au carrefour du coin, mais il faut aller en profondeur, afin d’extraire trafics et trafiquants.»[13] Donc enquêter ! Or, «Deux limites générales sont assignées par les textes au domaine de compétences des policiers municipaux : en matière de police administrative, la convention type de coordination entre la police municipale et les forces de sécurité de l'État interdit au service de police de municipale l'exercice du maintien de l'ordre (art. R. 2212-1 du CGCT) ; en matière de police judiciaire, les actes d'enquête leur sont interdits, ainsi que les contraventions relatives à l'atteinte à l'intégrité des personnes.» [14]

 

Conscient de ces limites, le feudataire pousse l’audace en rappelant à son suzerain ses obligations ! « En matière de sécurité, le trop n’existe pas, ce qui compte c’est de répondre aux exigences du moment et à l’évolution de la délinquance. Et si la violence augmente, les effectifs et les moyens des polices doivent augmenter en proportion. Oui, j’ai dit des polices. Car tout l’effort que nous faisons à Nice, au bénéfice de notre police municipale, nous ne sommes pas tenus de le faire. Et pourtant nous le faisons. En France, l’Etat est en charge de la sécurité publique. C’est une responsabilité qui lui incombe, et je suis de ceux qui veillent à le lui rappeler. […] Oui, l’action du maire, en matière de sécurité publique, est limitée. […] Et si la ville de Nice s’engage ainsi, j’attends naturellement de l’Etat que non seulement il ne se désengage pas, mais qu’il fasse lui-même un effort équivalent. »

 

Faut-il conclure à la félonie d’un obligé ? Que nenni ! Si l’édile critique vertement le désengagement croissant de l’Etat, le séide vote sciemment à l’Assemblée nationale les suppressions d'effectifs massives au sein de la gendarmerie et de la police nationales qu'impose la révision générale des politiques publiques (RGPP), et participe ainsi volontairement au démembrement de la sécurité publique dont il dénonce pourtant les conséquences dans son fief. Autre paradoxe : lorsque l’élu local déclame à l’adresse de ses agents de police municipale : « vous êtes dans la rue, auprès des Niçoises et des Niçois, là où vous devez être, confiant en votre mission et assumant votre vocation de service », faut-il en déduire une opposition implicite à toute extension de compétence, une volonté d’éviter toute qualification supplémentaire susceptible de les écarter du terrain, donc de la population, alors que simultanément l’élu national vote sans ambages toutes les dispositions contraires de la Loppsi 2 ?

 

Finalement, ce discours du 12 février 2011 s’apparente au verbiage oiseux et vétilleux d’un courtisan, qui cache mal un opportunisme politicien à l’approche d’élections cantonales qui s’annoncent sous de sombres auspices pour la majorité présidentielle.

 

C’est dans la même perspective électorale qu’il se prononce pour une égalité de traitement entre gardien de la paix et gardien de police municipale, psalmodiant sa nouvelle litanie : « à risque égal, à présence égal, à charge égale, salaires, primes et pensions égales ! » (sic) Il entretient délibérément la confusion entre les deux corps alors que ceux-ci ont des compétences différentes[15], à moins que cet aveuglement ne soit la conséquence d’une vision parcellaire de pratiques appliquées sur sa propre circonscription.

 



[2] Question n°25929 de Michel Terrot, député UMP du Rhône, en date du 24 juin 2008.

 http://questions.assemblee-nationale.fr/q13/13-25929QE.htm

 

[5] Faisant écho à une note interne de la DCSP (Direction centrale de la sécurité publique), intitulée « Les policiers de la sécurité publique en première ligne », Le Figaro faisait état de 1 100 policiers blessés au cours des deux premiers mois de 2010 alors que 5 358 policiers avaient été blessés en 2009.

http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2010/03/30/01016-...

 

[7] En 2007, celle-ci s’était intéressée au palais Nikaia, une salle de spectacle à grande capacité, et avait relevé plusieurs irrégularités à cette occasion.

 

[8] La face cachée de la vidéosurveillance

http://www.emilietherouin.fr/verts-mairie-amiens/index.ph...

 

[10] Question n°26844 de Xavier Breton, député UMP de l’Ain, en date du 8 juillet 2008.

http://questions.assemblee-nationale.fr/q13/13-26844QE.htm

 

Question n°20131 de Brigitte Le Brethon, députée UMP du Calvados, en date du 16 juin 2003.

http://questions.assemblee-nationale.fr/q12/12-20131QE.htm

 

[11] Avec la loi sur la représentativité de 2008, les syndicats catégoriels sont contraints à des alliances sous peine d’être purement et simplement menacés de disparition. Cette menace vise directement les syndicats dits « professionnels », comme l’USPPM, le SDPM ou le SIPM-FPIP, qui jouent désormais leur survie.

 

[12] 4 000 contacts divisés par 150 jours (5 mois fois 30 jours), soit une moyenne de 26,67 contacts par jour arrondie à 27, chiffre lui-même divisé par 5 (le nombre d’équipes d’îlotiers), soit un résultat de 5,4 contacts par jour et par équipe.

 

[13] Propos de Nicolas Sarkozy, ministre de l’Intérieur, lors d’une interview sur Europe 1 le mercredi 2 novembre 2005 au matin (8h20 ou 8h40) suite aux émeutes de Clichy-sous-Bois en Seine-Saint-Denis.

 

[14] Question n°85777 de Pierre Morel-A-L'Huissier, député UMP de Lozère, en date du 3 août 2010.

http://questions.assemblee-nationale.fr/q13/13-85777QE.htm