03/06/2011

POLICE MUNICIPALE DE NICE

Discours de Christian Estrosi du samedi 12 février 2011 [1]

Petite analyse personnelle

 

Le culte du chiffre

 

Christian Estrosi a le culte du chiffre : « 355 policiers municipaux, et 380 d’ici la fin de l’année, 150 ASVP », annonce-t-il fièrement pour la police municipale niçoise, sa police. Soit un ratio d’un ASVP pour deux agents de police municipale (APM). Si j’en crois le rapport de la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte-d’Azur sur la gestion de la ville de Cagnes-sur-Mer, publié en octobre 2010, le recours de plus en plus important aux ASVP sert aux communes du littoral azuréen à pallier les difficultés de recrutement ou sert de variable d’ajustement en matière de gestion des personnels de la police municipale (« la période estivale entraîne un regain d’activité de la police municipale alors que ses effectifs sont diminués du fait des congés »).

 

A ses côtés, Benoît Kandel, le « Monsieur Sécurité » de Nice. Je m’interroge à propos de cet ancien colonel de gendarmerie que Christian Estrosi aime à présenter en ces termes : « plus qu'un super-patron de la police municipale, […] une sorte de ministre de l'intérieur municipal » (J.-F.R., « Nice : Christian Estrosi présente son "Monsieur Sécurité" » in Nice Matin, mercredi 16 janvier 2008). Benoît Kandel a été nommé au poste d’adjoint à la sécurité. Mais au vu de la taille de la police municipale niçoise, qui le seconde ? Un directeur de police municipale ou un cadre de catégorie A ou un agent non titulaire ?

La hiérarchie de la police municipale de Nice m’intrigue, mais mon questionnement importe peu en vérité puisqu’au vu de l’arrêt n°300521 du Conseil d’Etat en date du mercredi 19 novembre 2008 concernant la commune de Saint-Paul-de-la Réunion, un agent de catégorie A peut être nommé en qualité de directeur de la sécurité publique, donc diriger un service de police municipale, ce qu’a confirmé l’an dernier le ministère de l’Intérieur dans sa réponse (tardive) à la question n°25929 de Michel Terrot, député UMP du Rhône [2].

Cela dit, la chambre des comptes régionale de PACA [3] « a constaté que la ville semblait rencontrer des difficultés pour recruter des agents de la fonction publique territoriale sur des emplois statutaires tels que directeur du centre du patrimoine, responsable de l’organisation du travail et des relations sociales, directeur des affaires culturelles, directeur de territoire, directeur de l’événementiel, directeur de la communication ou directeur de la mission politique de la ville. Ces emplois ont été pourvus par des agents non titulaires. Il ne peut s’agir que d’une exception au principe posé par les dispositions de l’article 2 de la loi statutaire du 26 janvier 1984 selon lesquelles les emplois permanents sont occupés par des fonctionnaires [publics territoriaux]. La collectivité qui a justifié avoir respecté les conditions de recherche préalable d’un candidat fonctionnaire, par une publicité adaptée, a précisé que selon elle, le niveau des candidats était trop souvent en dessous de ce que l’on était en droit d’attendre de candidats à des emplois de catégorie A ou de hauts fonctionnaires territoriaux. »

 

Vient ensuite un couplet flagorneur à l’attention des agents présents, du Sarkozy pur jus ! Un style qui ne se renouvelle guère en réalité. Voici ce que Christian Estrosi avait déclaré lors de son premiers discours [4], le vendredi 21 mars 2008, à la police municipale niçoise réunie : « Je l'annonce avec une certaine solennité et une certaine gravité pour que chacun me comprenne bien : le recrutement, l'avancement et les récompenses au sein de notre police municipale seront désormais examinés sur les seuls critères du mérite, du travail, des compétences et de l'engagement personnel. […] je veillerai à ce que tous les moyens nécessaires à l'accomplissement de votre mission vous soient accordés, que ce soit en termes d'équipement, d'armement, de vidéosurveillance, de cartographie numérique ou encore de véhicules. Dans ce domaine, je veux l'excellence pour Nice et je souhaite que nous devenions un modèle. […] Votre choix de vie est clair: vous avez librement décidé de servir la collectivité en devenant policier municipal. Ce choix vous honore. Ma considération et mon respect vous sont acquis.», ajoutant : «Je veux des policiers municipaux professionnels, bien dans leur peau et fiers de servir leur ville. »

 

Christian Estrosi rend un hommage appuyé aux dix agents niçois blessés au cours de l’année 2010. Dix agents blessés, soit ! Mais blessés suite à une agression, à un accident ? D’ailleurs, quel est le degré de gravité des blessures ? C’est aussi un chiffre qu’il faut relativiser : 10 blessés pour 82 000 interventions revendiquées. 10 blessés sur 355 APM, soit 2,80 %, un pourcentage qui tombe à 1,67 % si l’on prend en compte l’intégralité des effectifs de la police municipale niçoise (600) car on ignore le statut des personnels évoqués : APM ou ASVP ? Dans le second cas, titulaires ou contractuels ? Un chiffre à comparer, enfin, avec ceux de la police et de la gendarmerie nationale [5].

 

250 armes à feu

 

Christian Estrosi évoque ensuite l’armement de sa police : 20 Tasers, 10 Flashballs, 30 nouvelles armes de poing, précisant « ce qui porte à 250 le nombre d’armes à feu de 4ème catégorie à votre disposition ».

Cette remarque a tout de suite retenu mon attention. 250 armes à feu. Je suppose qu’il ne compte pas les 20 pistolets à impulsions électriques dans ce total. Par contre, je suis moins catégorique pour les 10 flashballs, qui sont, selon leur type, classés en 4ème ou 7ème catégorie, néanmoins, je les exclue du total pour simplifier. Donc 250 armes à feu revendiquées pour… « 355 policiers municipaux, et 380 d’ici la fin de l’année ». Deux conclusions sont alors possibles :

 

-          soit que tous les APM niçois ne sont pas armés, ce qui expliquerait pourquoi le député-maire de Nice ne figure pas parmi les signataires de la proposition de loi visant à généraliser le port d’armes des policiers municipaux déposée par son ami, l’inénarrable Patrick Balkany, député-maire de Levallois-Perret, dont la gestion municipale est un modèle [6]. Mais cette explication est alors en contradiction avec le ton martial du discours présent (et des précédents) puisqu’il déclare un peu plus loin : « A Nice, vous êtes armés. Vous êtes armés car je me refuse à vous laisser désarmés, à la merci de la violence. »

-          Soit les APM niçois partagent leurs armes. Les Flashballs sont généralement considérés comme des armes collectives, faut-il, cependant, en conclure que ce ne sont pas toujours les mêmes agents qui en disposent ? Dans l’affirmative, cela constitue un danger à la fois pour le fonctionnaire et pour la victime éventuelle. En effet, malgré les séances de tir annuelles obligatoires, comment se familiariser au quotidien avec cette arme spécifique si l’agent n’en dispose pas habituellement, s’il y a un roulement dans la dotation ? Mais ce qui est inquiétant pour le Flashball devient angoissant pour les armes de poing ! L’APM ne peut, en effet, régler l’arme à sa guise puisque ce n’est pas son arme : c’est donc une arme à laquelle il doit s’adapter et non l’inverse, d’où un danger potentiel.

 

Christian Estrosi met en avant des moyens de protection renforcés avec « la mise en service de 55 gilets pare-balles et bientôt de 33 autres », soit 88 au total. Comment faut-il interpréter ces chiffres : dotation initiale, partielle (au bénéfice des équipes de nuit) ou complémentaire (tous les autres APM en étant déjà dotés) ?

 

Autre caractéristique des polices municipales des villes du littoral azuréen (cf. à ce sujet le rapport de la chambre régionale des comptes de PACA à propos de la politique de sécurité de la commune d’Aix-en Provence) : la création de brigades spécialisées.

 

Vient ensuite son bébé : le CSU dont il dresse le bilan. « Avec 624 caméras, nous avons pu réaliser en moins d’un an 230 réquisitions judiciaires et 260 interpellations (une de plus cette nuit même suite à une tentative d’agression contre des pompiers). » Nous sommes priés de le croire mais je ne peux m’empêcher de me questionner : sur les 230 réquisitions judiciaires, combien ont réellement été utiles, c’est-à-dire ont permis la conclusion d’une enquête ? 260 interpellations ? De quelle nature ? 324 caméras, soit une pour 600 habitants, ce qui fait de Nice la ville la plus surveillée de France mais pas la plus sûre, au contraire ! Enfin, ce chiffre de 624 caméras fait écho au magazine Science & Vie d'avril 2010, qui a publié un article intitulé « Le bluff de la vidéosurveillance ». Voici son introduction : « Censées lutter contre la délinquance, les caméras de surveillance prolifèrent dans l'Hexagone. Or, le flot d'images qu'elles diffusent est humainement impossible à regarder ! Et l'analyse automatique reste expérimentale.» Avec 624 caméras, on est donc au-delà de l’humain, dans l’inhumain suis-je tenté d’écrire. Mais notre député-maire fanfaronne tout en passant sciemment sous silence le coût de son bébé, qui emploiera au final une cinquantaine d’agents, dont 10 travailleurs handicapés : 7,6 millions d’euros d’investissement, dont 6,4 pour la ville de Nice et 1,2 pour la communauté urbaine Nice Côte d’Azur, auxquels il faut ajouter une participation du Conseil général des Alpes-Maritimes pour 1,1 million, soit un total de 8,7 M€. Je me demande si la chambre régionale des comptes de PACA vérifiera un jour les conditions d’attribution de ces juteux contrats [7], si quelqu’un saisira la chambre régionale des comptes à ce propos, comme le permet l'article R.1612-35 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) ? Cela dit, on comprend mieux l’orientation répressive résolument prise avec la vidéoverbalisation. Si la vidéosurveillance, pardon vidéoprotection, est un leurre, la vidéoverbalisation est une réalité ! Si les caméras sont inefficaces pour traquer les délinquants, malgré la propagande officielle, elles sont, par contre, redoutables pour les automobilistes ! Il faut bien rentabiliser l’investissement, me direz-vous.

Christian Estrosi est également muet à propos de la formation (ou l’absence de formation ?) des opérateurs vidéos. Je me permets ici de faire écho aux réflexions d'Emilie Thérouin, adjointe à la sécurité de la ville d'Amiens. Celle-ci remarque que « L'opérateur vidéo est bien le parent pauvre de l'agitation qui existe autour de la vidéosurveillance. Beaucoup s'évertuent à disserter sur l'importance de l'outil vidéo, mais qui pour "penser" aux opérateurs ? [...] Pourtant, Opérateur vidéo reste un métier de l'ombre, non reconnu par le législateur qui, pourtant, est friand de légiférer sur la sécurité et son dada, la vidéosurveillance. Mais le CNFPT est lui aussi très en retard sur les métiers de la sécurité. Ainsi, il n'existe pas de formation initiale commune, encore moins un plan de formation continue obligatoire pour les opérateurs vidéo. Chaque ville bricole dans son coin avec le recrutement, la formation, la déontologie. Seul le double agrément préfecture/procureur est exigé. L'opérateur peut être un ASVP, agent technique qui ne dépend pas de la filière sécurité, ou encore un agent administratif. » [8]

Pour clore sur ce chapitre de la vidéosurveillance, je reprends à mon compte les propos d’Yves Chastan, sénateur-maire de Privas, pour lequel « La vidéosurveillance est un pis-aller » puisque « ce type de système ne s'attaque pas aux causes réelles de la délinquance que sont le délitement de la société, le chômage de masse depuis quinze ou vingt ans, et l'apologie de l'individualisme et de l'argent facile et vite gagné » (L’Essor n°430 de décembre 2010).

 

Christian Estrosi annonce fièrement une augmentation de 30 % des effectifs de sa police municipale, ce qui se traduit concrètement pour la ville par « un effort financier de 6 millions d’euros obtenus par une plus grand maîtrise de nos dépenses de fonctionnement ». La gestion de Christian Estrosi n’a pas été évaluée par la chambre des comptes régionale de PACA à la différence de celle de son prédécesseur, Jacques Peyrat, sénateur-maire. Dans le rapport de 2007, on apprend que le budget principal de la ville de Nice pour 2004 « représentait plus de 570 M€ en fonctionnement et près de 380 M€ en investissement, soit un total proche d’un milliard d’euros. » On découvre aussi que Nice n’a rien à envier à la gestion de Levallois-Perret : « La chambre a constaté que la ville de Nice avait continué à honorer des échéances d’emprunt pour des organismes défaillants auxquelles elle avait apporté sa garantie. […] Six dossiers ont particulièrement retenu l’attention de la juridiction. […] En conclusion, si les faits évoqués supra résultent d’une politique municipale différente de celle conduite aujourd’hui, il demeure que l’ensemble des défaillances des organismes auxquels la ville avait accordé sa garantie lui a coûté plus de 51 M€. » Une somme que la municipalité n’a apparemment pas provisionnée en dépit des risques avérés. Cependant, la ville de Nice est riche, d’où une remarquable capacité d’autofinancement, qui limite de fait l’endettement. Toutefois, « la chambre considère que la situation financière apparemment convenable ne devrait pas masquer la perspective, à partir de 2006, d’un accroissement de l’endettement de la ville sous l’effet de dépenses d’équipement évaluées à 240 M€ pour les deux années 2007 et 2008. En effet, à périmètre budgétaire identique, ces dépenses ne pourront vraisemblablement pas être couvertes par un autofinancement supérieur à 50 M€ par an, sauf à actionner le levier fiscal, à comprimer les dépenses de fonctionnement ou à dégager des ressources financières nouvelles. » En outre, à l’époque, la chambre des comptes régionale n’a pas pris en compte les conséquences de la crise financière en gestation.

 

La ville de Nice apporte un important concours financier au secteur associatif. « Entre 1999 et 2003, le nombre d’organismes subventionnés par la ville de Nice a été en moyenne de 900. En 2004, on ne dénombrait plus que 600 associations subventionnées. Durant cette période, la ville a consacré plus de 140 M€ au secteur associatif, ce qui a représenté, chaque année, près de 5 % de ses dépenses totales de fonctionnement. » Parmi les bénéficiaires de la générosité municipale, la vénérable Archiconfrérie de la Sainte-Croix de Nice, plus communément connue sous le nom de « pénitents blancs », en raison de la couleur de la cape portée par ses membres [9]. Malgré les vents mauvais qui vont très prochainement déferler sur la laïcité, je ne vais pas m’attarder sur le lobby catholique mais je signale l’enquête de Marc Baudriller publiée en 2008 chez Robert Laffont : « Les réseaux cathos »... apparemment aussi actifs à Nice qu’à l’Elysée, suis-je, néanmoins, tenté d’ajouter. Christian Estrosi leur fait peut-être même indirectement un clin d’œil en affirmant que « Cette volonté de dévouement, cette préoccupation du service sont des vertus devenues rares. »

 

Un policier municipal pour 610 habitants ?

 

Christian Estrosi se lance ensuite dans une audacieuse comparaison pour mieux glorifier son action : « Cet effort financier, humain, que je maintiens et que je développe, est unique en France. Savez-vous qu’à Toulouse, la police municipale ne travaille pas la nuit ? Savez-vous qu’à Marseille, elle n’est pas armée ? A Marseille ! Savez-vous qu’à Lyon, il y a 1 policier municipal pour 1439 habitants ? Eh bien à Nice, il y a un policier municipal pour 610 habitants. » Peu lui importe que la police municipale ne soit pas la police nationale, encore moins que ses prérogatives lui imposent des missions différentes, Christian Estrosi assume la confusion des casquettes, la revendique même ! Il assène avec force son ratio : un policier municipal pour 610 habitants ! Un policier municipal pour 610 habitants ? La population niçoise est estimée à 338 219 habitants pour 2010, donc en hausse, même si elle n’atteint pas encore le maximum établi en 1975 avec le chiffre record de 344 481, et surtout vieillissante. Cela dit, pour parvenir au coefficient avancé par Christian Estrosi, il faut nécessairement et volontairement faire l’amalgame de l’ensemble des personnels affectés au service de police municipale, à savoir : « 355 policiers municipaux, et 380 d’ici la fin de l’année, 150 ASVP, qui assistent les policiers municipaux sur la voie publique, et 70 personnels administratifs indispensables au fonctionnement quotidien et logistique de la Direction. » Or, comme l’a rappelé à bon escient le rapport de l’IGA sur les polices municipales, un ASVP n’est pas un APM ! Celui-ci ne peut se voir confier des missions de sécurité publique (cf. circulaire INT/D/05/00024/C du 15 février 2005). En tant qu'ASVP, leur compétence se limite strictement à constater les infractions aux règles relatives à l'arrêt et au stationnement des véhicules [10]. Toutefois, si la ville de Nice arrive à l’effectif de 380 APM, le ratio sera d’un APM pour 890 habitants, ce qui n’est pas négligeable. Finalement, Christian Estrosi s’inscrit dans la lignée de son prédécesseur et concurrent, pour ne pas dire ennemi. La chambre avait, en effet, noté à propos des effectifs municipaux que « Les charges brutes de personnel ont conservé, de 1999 à 2003, un niveau identique d’environ 220 M€ par an pour atteindre 232 M€ en 2004, alors pourtant que la création de la communauté d’agglomération, en 2002, a été accompagnée d’un transfert de 460 agents de la ville dont 422 agents titulaires. […] Elles absorbaient environ 46 % des dépenses totales de fonctionnement de l’année 2004 et étaient nettement supérieures au produit de la fiscalité directe des trois taxes, soit 184 M€. ». Autre remarque de la juridiction financière : le cabinet du maire mobilisait « plus de 4 % de l’effectif total de la collectivité ce qui est important pour une ville de la taille de Nice. » Qu’en est-il aujourd’hui ?

 

Chose rare à relever : Christian Estrosi se félicite du dialogue constructif avec les syndicats, encensant notamment l’action des délégués syndicaux de FO, de la CGT et du SNPM-CFTC ; son mutisme à l’endroit d’autres organisations syndicales est éloquent[11]. Le député-maire déclare, en effet, « A Nice, vous travaillez 24h sur 24. Vous travaillez 24h sur 24 car, avec vos représentants syndicats, que je remercie et que je salue avec gratitude aujourd’hui, nous avons pu trouver des aménagements d’horaires convenables pour vous permettre d’assurer votre mission. » Il faut dire que la ville de Nice a une culture du dialogue social et une gestion des ressources humaines, qui ont étonné jusqu’à la chambre régionale des comptes de PACA ! Cette dernière a ainsi constaté que « Chaque direction des services municipaux doit définir, par unité de travail, la formule horaire la mieux adaptée à son organisation et ses contraintes fonctionnelles ». Dès lors, « chaque service est libre de son choix », d’où « une diversité des horaires de travail ». La gestion des heures supplémentaires a également interpellé la juridiction financière, qui note dans son rapport de 2007 que « L’examen des volumes d’heures supplémentaires accordés aux agents, notamment au service du nettoiement et au cabinet, a conduit la chambre à s’interroger sur les modalités de leur gestion qui suscitent plusieurs observations. » Elle signale, par exemple, que « des agents pouvaient bénéficier d’heures supplémentaires, attestées par des chefs de service distincts, pour une même date, à un même horaire et pour deux lieux d’exécution différents. »

 

Le député-maire défend l’action de sa police : « Depuis septembre 2010, nos 8 équipes d’îlotiers ont déjà plus de 4000 prises de contact, dans le secteur de la ville que nous avons choisi comme terrain d’expérience, c’est-à-dire nos quartiers nord. » 4 000 prises de contact depuis septembre 2010 ? Un rapide calcul permet de conclure à moins de six contacts par jour et par équipe [12], ce qui est particulièrement faible. Cela n’empêche nullement Christian Estrosi de défendre l’îlotage, donc la police de proximité pourtant vouée aux gémonies par Nicolas Sarkozy, qui, ministre de l’Intérieur, assénait, le 4 février 2003, à Toulouse, que « La police de proximité est là pour prévenir mais si elle est faite au détriment du travail d'investigation et d'interpellation, elle ne sert à rien... », ajoutant avec ironie : « Je ne peux pas croire qu'ici les délinquants soient plus difficiles à interpeller. Ici, il n'y a pas de problèmes de moyens, mais de priorité » ! « Vous n'êtes pas des travailleurs sociaux », avait-il lancé à un îlotier qui lui présentait, sur ordre des conseillers de Sarkozy, un tournoi de football organisé avec les jeunes du quartier. « Les citoyens attendent d'abord de vous que vous arrêtiez les délinquants ». Or, voici que son féal niçois veut « étendre à la cité toute entière, à tous ses quartiers, même les plus difficiles, cette action exemplaire qu’est l’îlotage » ! Pis, le vassal argumente en ce sens :

 

L’îlotage, c’est plus de connaissance de terrain et des hommes.

L’îlotage, c’est une source de renseignement complémentaire pour interpeller plus vite, plus précisément, plus efficacement.

L’îlotage, c’est plus d’humanité et de compréhension des habitants et des problématiques des quartiers.

 

Mais hier comme aujourd’hui, l’ancien ministre de l’Intérieur peut toujours rétorquer à son homme lige que «Pour faire ce travail (garantir la sécurité dans les quartiers sensibles), il ne suffit pas de poster un policier au carrefour du coin, mais il faut aller en profondeur, afin d’extraire trafics et trafiquants.»[13] Donc enquêter ! Or, «Deux limites générales sont assignées par les textes au domaine de compétences des policiers municipaux : en matière de police administrative, la convention type de coordination entre la police municipale et les forces de sécurité de l'État interdit au service de police de municipale l'exercice du maintien de l'ordre (art. R. 2212-1 du CGCT) ; en matière de police judiciaire, les actes d'enquête leur sont interdits, ainsi que les contraventions relatives à l'atteinte à l'intégrité des personnes.» [14]

 

Conscient de ces limites, le feudataire pousse l’audace en rappelant à son suzerain ses obligations ! « En matière de sécurité, le trop n’existe pas, ce qui compte c’est de répondre aux exigences du moment et à l’évolution de la délinquance. Et si la violence augmente, les effectifs et les moyens des polices doivent augmenter en proportion. Oui, j’ai dit des polices. Car tout l’effort que nous faisons à Nice, au bénéfice de notre police municipale, nous ne sommes pas tenus de le faire. Et pourtant nous le faisons. En France, l’Etat est en charge de la sécurité publique. C’est une responsabilité qui lui incombe, et je suis de ceux qui veillent à le lui rappeler. […] Oui, l’action du maire, en matière de sécurité publique, est limitée. […] Et si la ville de Nice s’engage ainsi, j’attends naturellement de l’Etat que non seulement il ne se désengage pas, mais qu’il fasse lui-même un effort équivalent. »

 

Faut-il conclure à la félonie d’un obligé ? Que nenni ! Si l’édile critique vertement le désengagement croissant de l’Etat, le séide vote sciemment à l’Assemblée nationale les suppressions d'effectifs massives au sein de la gendarmerie et de la police nationales qu'impose la révision générale des politiques publiques (RGPP), et participe ainsi volontairement au démembrement de la sécurité publique dont il dénonce pourtant les conséquences dans son fief. Autre paradoxe : lorsque l’élu local déclame à l’adresse de ses agents de police municipale : « vous êtes dans la rue, auprès des Niçoises et des Niçois, là où vous devez être, confiant en votre mission et assumant votre vocation de service », faut-il en déduire une opposition implicite à toute extension de compétence, une volonté d’éviter toute qualification supplémentaire susceptible de les écarter du terrain, donc de la population, alors que simultanément l’élu national vote sans ambages toutes les dispositions contraires de la Loppsi 2 ?

 

Finalement, ce discours du 12 février 2011 s’apparente au verbiage oiseux et vétilleux d’un courtisan, qui cache mal un opportunisme politicien à l’approche d’élections cantonales qui s’annoncent sous de sombres auspices pour la majorité présidentielle.

 

C’est dans la même perspective électorale qu’il se prononce pour une égalité de traitement entre gardien de la paix et gardien de police municipale, psalmodiant sa nouvelle litanie : « à risque égal, à présence égal, à charge égale, salaires, primes et pensions égales ! » (sic) Il entretient délibérément la confusion entre les deux corps alors que ceux-ci ont des compétences différentes[15], à moins que cet aveuglement ne soit la conséquence d’une vision parcellaire de pratiques appliquées sur sa propre circonscription.

 



[2] Question n°25929 de Michel Terrot, député UMP du Rhône, en date du 24 juin 2008.

 http://questions.assemblee-nationale.fr/q13/13-25929QE.htm

 

[5] Faisant écho à une note interne de la DCSP (Direction centrale de la sécurité publique), intitulée « Les policiers de la sécurité publique en première ligne », Le Figaro faisait état de 1 100 policiers blessés au cours des deux premiers mois de 2010 alors que 5 358 policiers avaient été blessés en 2009.

http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2010/03/30/01016-...

 

[7] En 2007, celle-ci s’était intéressée au palais Nikaia, une salle de spectacle à grande capacité, et avait relevé plusieurs irrégularités à cette occasion.

 

[8] La face cachée de la vidéosurveillance

http://www.emilietherouin.fr/verts-mairie-amiens/index.ph...

 

[10] Question n°26844 de Xavier Breton, député UMP de l’Ain, en date du 8 juillet 2008.

http://questions.assemblee-nationale.fr/q13/13-26844QE.htm

 

Question n°20131 de Brigitte Le Brethon, députée UMP du Calvados, en date du 16 juin 2003.

http://questions.assemblee-nationale.fr/q12/12-20131QE.htm

 

[11] Avec la loi sur la représentativité de 2008, les syndicats catégoriels sont contraints à des alliances sous peine d’être purement et simplement menacés de disparition. Cette menace vise directement les syndicats dits « professionnels », comme l’USPPM, le SDPM ou le SIPM-FPIP, qui jouent désormais leur survie.

 

[12] 4 000 contacts divisés par 150 jours (5 mois fois 30 jours), soit une moyenne de 26,67 contacts par jour arrondie à 27, chiffre lui-même divisé par 5 (le nombre d’équipes d’îlotiers), soit un résultat de 5,4 contacts par jour et par équipe.

 

[13] Propos de Nicolas Sarkozy, ministre de l’Intérieur, lors d’une interview sur Europe 1 le mercredi 2 novembre 2005 au matin (8h20 ou 8h40) suite aux émeutes de Clichy-sous-Bois en Seine-Saint-Denis.

 

[14] Question n°85777 de Pierre Morel-A-L'Huissier, député UMP de Lozère, en date du 3 août 2010.

http://questions.assemblee-nationale.fr/q13/13-85777QE.htm

 

02/06/2011

POLICES MUNICIPALES : MYTHES ET RÉALITÉS

« Avec 20 000 agents, et même 23 000 en y intégrant les gardes champêtres, les polices municipales participent pleinement à la mise en œuvre de la politique de sécurité. Une loi d’orientation pour la sécurité intérieure se doit donc d’en tenir compte. […] Il s’agit de tenir compte de la réalité des polices municipales qui, bien souvent, assurent la majorité de la présence sur la voie publique. » C’est en ces termes qu’Eric Ciotti, député UMP des Alpes-Maritimes, défend l’extension des prérogatives judiciaires des polices municipales dans son rapport n°2271 sur le projet de loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, plus connu sous l’acronyme de Loppsi 2.

 

Une telle assertion mérite, cependant, certaines précisions car il ne suffit pas d’affirmer, il faut démontrer la véracité de ce que l’on avance en la matière !

 

Les effectifs d’abord. Eric Ciotti annonce « 20 000 agents et même 23 000 en y intégrant les gardes champêtres ». Or, selon le récent rapport du préfet Jean Ambroggiani, « Les polices municipales, toutes catégories de personnels confondues, ne représentent qu’un effectif de 23 000 agents. » Toujours selon le même rapport, dans ce total, les gardes champêtres seraient environ 1 800 tandis que les ASVP (agents de surveillance de la voie publique) dont les compétences sont limitées au stationnement représenteraient 3 000 personnes. Enfin, dans une étude consacrée aux polices municipales en Île-de-France (avril 2009), l’Institut d’Aménagement et d’Urbanisation de cette région avance le chiffre de 3 452 communes dotées d’une police municipale, employant 18 172 fonctionnaires. Or, en dépit des suppressions de postes annoncées, la gendarmerie comptera l’an prochain au total environ 101 000 personnels, dont 98 155 militaires, tandis que l’effectif sera de 144 790 pour la police nationale (rapport général fait au nom de la commission des finances du Sénat sur le projet de loi de finances pour 2010 par Philippe Marini, tome III Moyens des politiques publiques et dispositions spéciales,  annexe n°28 Sécurité réalisée par Aymeri de Montesquiou, en date du 19 novembre 2009). Même en ne prenant uniquement en compte que les effectifs de sous-officiers de gendarmerie (74 505) et ceux du corps d’encadrement et d’application (gradés et gardiens de la paix, soit 102 896), on obtient un total de 177 401. Par conséquent, les agents de police municipale ne peuvent représenter plus de 10,24 % de ce total (moins de 7,5 % de l’ensemble des effectifs).

 

En sus, la diversité est de mise entre les polices municipales. Les effectifs sont ainsi très variables d’une localité à l’autre. Sur l’ensemble des communes nanties d’une police municipale, la moitié ne dispose que d’un ou deux agents alors qu’une dizaine de villes, dont Lille et Orléans, en ont au moins 100. La répartition géographique des polices municipales est également très inégale sur le territoire national ; elles sont principalement implantées dans le Midi et en région parisienne. Il est aussi intéressant de noter que la fonction publique territoriale représente un tiers des emplois publics (Bulletin d’informations statistiques de la DGCL n°63 d’octobre 2008) mais la filière police municipale représente seulement 1,3 % de cet ensemble. Il eût aussi été opportun de rapporter le nombre de localités disposant d’une police municipale au nombre total de communes : moins de 3 500 contre 36 783 (dont 212 en outre-mer), soit moins de 10 %... Preuve que les polices municipales constituent un épiphénomène dans le monde de la sécurité.

 

Le débat parlementaire actuel est donc faussé, pour ne pas dire tronqué puisque fondé sur un constat erroné. Mais il est vrai que les Alpes-Maritimes sont précurseur dans le mélange des casquettes ; la région PACA alignant les plus forts bataillons d’agents de police municipale, comment pourrait-il en être autrement ? Néanmoins, un élu de la République, membre de la Représentation nationale, ne devrait-il pas être capable de prendre plus de hauteur sur les sujets qu'il aborde plutôt que de se contenter d'une vision parcellaire de pratiques appliquées sur sa propre circonscription ? De même, il faut dénoncer la pernicieuse confusion qui règne dans l'esprit de nombre de concitoyens entre la police nationale et les polices municipales, et les abus qui en découlent. Ces deux corps n'ont pas les mêmes compétences, mais leur homonymie engendre l'amalgame. Or, les partisans des polices municipales affectionnent, voire entretiennent savamment cette méprise. Enfin, dans un rapport remis début 1998 au ministre de l’Intérieur de l’époque, Jean-Pierre Chevènement, l’inspecteur général Jacques Genthial précisait : « Un des points faibles des polices municipales est la dévotion sans faille, voire le culte, que les agents portent à leur maire. On sait que parmi ces derniers, certains abusent de leur position, mais il s’agit manifestement d’un nombre négligeable d’élus. »

 

Simultanément, les élus locaux s’inquiètent du désengagement de l’Etat. Ainsi, Laurent Grelaud, maire de Bonsecours (commune qui a perdu son bureau de police il y a déjà plusieurs mois) s'inquiète de cette situation. « Avec des postes de police répartis un peu partout sur le territoire, on offre de la proximité et de la sécurité. Maintenant, on doit compenser avec notre police municipale. Mais elle n'a pas les mêmes pouvoirs. On risque de voir augmenter la délinquance, le bureau de police jouait un rôle de dissuasion. » (Paris Normandie, 27 avril 2009). D’ailleurs, les communes n’ont ni la possibilité, ni la volonté de se substituer à l’Etat ou de compenser le désengagement croissant de ce dernier en matière de sécurité (même si celui-ci tente de se défausser davantage sur elles et le secteur privé tout en se réservant les lauriers en cas de succès). Pourtant, force est de constater l’activisme effréné du lobby des polices municipales à tous les échelons[1]. Dernier exemple en date : l’intervention de Patrick Balkany, député-maire UMP de Levallois-Perret dans les Hauts-de-Seine, pour permettre aux agents de police municipale d’accéder aux fichiers de la police nationale (question n°69365 en date du 26 janvier 2010). Démagogie sécuritaire ou stratégie délibérée – mais inavouée – visant à balkaniser la police pour, in fine, remplacer la police nationale par des polices municipales ?

 

Face à cet indéfectible soutien politique, il ne faut pas s’étonner que « Les policiers municipaux réclament un alignement des grilles indiciaires sur la police nationale et une intégration de leurs primes dans les calculs des droits à la retraite », comme le titre La Gazette des communes suite à la manifestation lancée le jeudi 4 février 2010 à l’initiative du SNPM-CFTC. « Nous faisons le même travail que les policiers et les gendarmes nationaux », clame même Frédéric Foncel, vice-président du Syndicat national des policiers municipaux. Surprenante allégation qui amène cette interrogation : les gardiens de police municipale ont-ils les mêmes prérogatives que les gardiens de la paix ? La réponse est actuellement non. Pis, ils ont moins de pouvoirs que les gardes champêtres !

 

Les polices municipales assurent la majorité de la présence sur la voie publique ? Pieux mensonge d’un thuriféraire des polices municipales… Mais il est vrai qu’en certains endroits, sur commande politique ou pour des raisons de mésentente entre individus, les agents de police municipale (APM) d'une ville peuvent se donner le mot (la nuit, par exemple) pour réaliser un maximum d'interpellations (infraction à la législation sur les stupéfiants, conduite sous l'empire d'un état alcoolique, tapage, etc.) ; ce type d'interpellations est assez simple à réaliser, d’autant qu’il ne nécessite qu’un simple rapport de mise à disposition de la part des APM[2]. La conséquence de cela est que les policiers nationaux se trouvent alors complètement submergés par le travail apporté par les APM et n'ont dès lors plus qu'une malheureuse petite patrouille sur la voie publique. Ajoutons à cela quelques contraintes supplémentaires gérées par la police nationale (PN) sur la même vacation nocturne ou diurne d'ailleurs (garde d'un détenu hospitalisé, garde d'un détenu présenté à un magistrat, déclenchement d'alarme dans un bâtiment public type préfecture ou banque de France…) et, là, le système est complètement en croix pendant que la PM occupe la voie publique. Détail d’importance : si les individus interpellés par la PM sont mis en garde à vue, ils sont gardés dans les locaux de la PN. Or, les gardes à vue n’ont-elles pas explosé ces dernières années[3] ?

 

Autre précision : les APM ne sont pas soumis aux interventions dites de « police secours » puisque les appels du 17 arrivent dans les commissariats de PN. Hélas, là aussi, lorsque les commissariats sont débordés pour diverses raisons, il arrive bien souvent que le Centre d'Information et de Commandement où arrivent ces appels missionne des policiers municipaux pour faire l'intervention. Là aussi, c'est une dérive réelle qui augmente de fait le risque pour les PM.

 

Quid des pouvoirs des APM ? Selon l’article 21 du Code de procédure pénale (CPP), les agents de police municipale (APM) appartiennent à la catégorie des agents de police judiciaire adjoints (APJA21) et non à celle d’APJ20 à l’instar des gardiens de la paix et gendarmes. L'APM ne peut donc pas prendre de plainte, ni rédiger un procès-verbal d'interpellation ou prendre une audition… Bien évidemment, en cas de flagrant délit, ces fonctionnaires territoriaux peuvent, comme tout citoyen en application de l’article 73 du CPP, appréhender le malfaiteur et le présenter immédiatement à un officier de police judiciaire[4]. Dans un autre ordre d’idées, l’article 21 du CPP n’exige pas que les agents de police judiciaire adjoints, pour exercer effectivement leurs attributions, soient affectés à un emploi comportant cet exercice. Un APM affecté à un emploi de bureau peut donc exercer sans autre formalité ses attributions de police judiciaire. Les gardes champêtres appartiennent quant à eux, selon les articles 22 à 25 et 27 du même code, à la catégorie des fonctionnaires et agents chargés de certaines fonctions de police judiciaire et plus précisément à celle des ingénieurs, chefs de district et agents techniques des eaux et forêts et des gardes champêtres.

 

A contrario, force est de reconnaître que les prérogatives des APM au regard du Code de la route sont proches de celles des fonctionnaires de l’Etat (mais des exceptions demeurent comme l’intervention sur autoroute). Selon l’article R.130-2 du Code de la route, les APM peuvent, en effet, constater par procès-verbal (PV) toutes les contraventions de la partie réglementaire du Code de la route, à quelques exceptions édictées par ledit article. Mais, astuce juridique, ce qui ne peut être constaté par PV peut toujours l’être par rapport puisque les exceptions de l’article R.130-2 ne le sont que pour la constatation par PV. Cependant, cette faculté ne permet pas aux APM de procéder d’initiative à des contrôles routiers en l’absence d’une infraction (pas de pouvoir de recherche, d’investigation, uniquement du flagrant délit, la dite notion de délit étant générale et visant les contraventions comme les crimes). Néanmoins, les fonctionnaires territoriaux peuvent arrêter un véhicule dont le conducteur n'a commis aucune infraction préalable, ceci dans le but de vérifier si ce dernier est bien détenteur du permis de conduire puisque les gardes champêtres et les agents de police municipale sont habilités à constater la violation des dispositions de l'article R.233-1 en application des dispositions des articles R.130-1 à R.130-3 du Code de la route.

 

Dernier point : les buts de la police municipale, énoncés à l’article L2212-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT), sont le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Mieux, l’intervention de la police municipale se fait dans un cadre coordonné avec les autres forces de police et de gendarmerie. En effet, conformément aux dispositions de l'article L.2212-6 du CGCT, une convention définissant la nature et les lieux des interventions des agents de police municipale est signée entre le préfet et le maire, après avis du procureur de la République ; elle est obligatoire pour les services de police municipale qui excèdent cinq agents ou dont les fonctionnaires sont armés. Mais ladite convention spécifie aussi dans son préambule : «  En aucun cas, il ne peut être confié à la police municipale de mission de maintien de l'ordre » (cf. décret n°2000-275 du 24 mars 2000).

 

Pour conclure, je poserai une question : Les agents de police municipale revendiquent aujourd’hui les mêmes droits et avantages sociaux que les policiers nationaux mais dans cette perspective, sont-ils prêts à perdre leur droit de grève[5] ?

 

 

Nota Bene : cet article a été publié pour la première fois le 14 février 2010 sur le blog de Georges Moréas, Commissaire principal honoraire de la Police nationale :

http://moreas.blog.lemonde.fr/2010/02/14/la-police-munici...


 


[1] Sécurité : le lobbying des policiers municipaux

http://phmadelin.wordpress.com/2009/01/26/securite-le-lob...

 

[2] La circulaire du ministère de l’Intérieur du 26 mai 2003 (INT D0300058C) précise « que, dès lors qu’ils ont remis à la police ou à la gendarmerie nationale les délinquants interpellés en état de flagrance, les agents de police municipale ne sont plus compétents. Il revient alors à ces services de décider des suites à donner (mesures de garde à vue notamment) et de conduire les enquêtes diligentées par le parquet. Les missions des agents de police municipale ne leur confèrent pas, en effet, de pouvoirs d’investigation » (page 5).

 

[3] « La garde à vue ? Une politique du chiffre » : paroles de flic

http://www.lesinrocks.com/actualite/actu-article/t/126520...

 

[4] La circulaire du ministère de l’Intérieur du 26 mai 2003 spécifie, néanmoins, que « cette possibilité offerte à tout citoyen devient une impérieuse nécessité pour les agents de police municipale, qui sont des acteurs à part entière de la sécurité publique » (page 4).

 

[5] A ce sujet, je me permets de retranscrire, avec son accord, les propos d’un fonctionnaire de police :

 

« Les fonctionnaires de la police nationale ont perdu leur droit de grève en 1948. En contrepartie, ils ont obtenu quelques avantages dans le cadre d'un statut spécial.

 

Contraintes du statut de 1948 : Interdiction du droit de grève, disponibilité pour le service, durée d'affectation, mobilité, horaire atypiques, astreintes, permanences.

 

Avantages : Bonification du 1/5ème pour la retraite (le policier bénéficie une annuité supplémentaire tous les cinq ans dans la limite de cinq années), limite d'âge à 55 ans, indemnité de sujétions spéciales police dite ISSP (qui représentera bientôt 26 % du salaire), grille indiciaire dérogatoire à la grille type de la Fonction publique.

 

Souvent improprement appelée « prime de risque », l’ISSP n’est, en réalité, qu’une prime destinée à compenser le fait que les fonctionnaires de police n'ont pas le droit de grève. Les policiers ne bénéficient donc pas de prime de risque, hormis les membres de corps d’élite comme le RAID, même si, de mémoire, elle est assez ridicule.

 

Par contre, le fait que la prime principale, l'ISSP, soit intégrée au calcul de la pension n'a rien à voir avec le statut spécial. Ce fait découle de textes de 1982 pris suite à des revendications de longues dates de la FASP. Il s'agit effectivement d'une grande victoire syndicale mais il faut savoir tout de même que nous finançons en grande partie cette réforme puisque nous cotisons davantage que les fonctionnaires des autres ministères pour la retraite. »

POLICES MUNICIPALES : LES TRANSFUGES DE LA GENDARMERIE (1/2)

Le 9 juillet dernier, Les Dernières Nouvelles d’Alsace présentaient la dernière recrue de la police municipale de Volgelsheim : Emmanuel Andreoni, âgé de 37 ans et précédemment gendarme motocycliste pendant 17 ans. Le 20 du même mois, La Dépêche du Midi dressait le portrait du nouveau chef de la police municipale de La Salvetat-Saint-Gilles, Stéphane Vidis, ancien sous-officier de la gendarmerie. Ces exemples témoignent d’un phénomène appelé à s’amplifier avec la loi n°2009-972 du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique (1). En effet, ce texte ouvre désormais totalement la fonction publique civile aux militaires (article 1er), parachevant par la même une évolution amorcée en 2006 par Dominique de Villepin, alors Premier ministre.

Ce dernier avait ouvert la voie en facilitant le détachement de « fonctionnaires appartenant à un cadre d'emplois, un corps ou un emploi de catégorie C ou de niveau équivalent […] dans le cadre d'emplois des agents de police municipale sous réserve qu'ils aient obtenu préalablement l'agrément du procureur de la République et du préfet » et suivi la formation initiale d’application (FIA) d’une durée de six mois (article 13 du décret n°2006-1391 du 17 novembre 2006). Mais cette disposition ne s’adressait pas aux gendarmes en raison de leur statut militaire. Par contre, ceux-ci pouvaient se prévaloir de l'article 62 de la « loi n°2005-270 du 24 mars 2005 portant statut général des militaires et relatif aux modalités spécifiques de détachement et d'intégration des militaires dans un cadre d'emplois relevant de la fonction publique territoriale », devenu l’article L4139-2 du Code de la défense après l’abrogation de ladite loi par l’ordonnance n°2007-465 du 29 mars 2007. Ce dernier spécifie que « Le militaire, remplissant les conditions de grade et d'ancienneté fixées par décret, peut, sur demande agréée, après un stage probatoire, être détaché pour occuper des emplois vacants et correspondant à ses qualifications au sein des administrations de l'Etat, des collectivités territoriales, de la fonction publique hospitalière et des établissements publics à caractère administratif, nonobstant les règles de recrutement pour ces emplois. » Cependant, le décret n°2008-393 du 23 avril 2008 pose des conditions draconiennes ! Il impose, par exemple, aux éventuels prétendants à un détachement pas moins de dix années de services militaires préalables (article D4139-11 du Code de la défense) ; en-deçà, il faut passer le concours. En outre, l’article L4139-1 du Code susvisé précise que « La demande de mise en détachement du militaire lauréat d'un concours de l'une des fonctions publiques civiles ou d'accès à la magistrature est acceptée, sous réserve que l'intéressé ait accompli au moins quatre ans de services militaires, ait informé son autorité d'emploi de son inscription au concours et ait atteint le terme du délai pendant lequel il s'est engagé à rester en position d'activité à la suite d'une formation spécialisée ou de la perception d'une prime liée au recrutement ou à la fidélisation. » Reste que ce phénomène n’est pas nouveau. Pour preuve, la loi no70-2 du 2 janvier 1970 tendant à faciliter l’accès des militaires à des emplois civils, d’abord réservée aux officiers puis étendue aux sous-officiers de carrière des grades de major, d’adjudant-chef ou de maître principal.

Cependant, ce phénomène interpelle aujourd’hui car il touche désormais des gendarmes de tous âges et de tous grades, alors qu’il ne concernait autrefois que des retraités, souvent pour entamer une seconde carrière professionnelle après quinze années d’exercice (ou plus) ou après l’âge de 55 ans. Ainsi, n’était-il pas rare qu’un gendarme devînt garde champêtre ; Paul Chevrier, président du Syndicat national autonome des gardes champêtres contemporains (SNAGCG affilié à l’UNSA), est un ancien de l’Arme. D’ailleurs, les relations des gardes champêtres avec la gendarmerie nationale ont fait l'objet de plusieurs mesures réglementaires ; les liens étroits entre ces deux corps remontent à 1791, année de la création de l'actuelle gendarmerie nationale suite à la loi du 16 février 1791 (2). Le décret du 11 juin 1806 et l'ordonnance du 29 octobre 1820 fixaient déjà les termes de la collaboration entre la gendarmerie nationale et les gardes champêtres. Celle-ci est toujours d’actualité puisque l’article L2213-16 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) spécifie que « La police des campagnes est spécialement placée sous la surveillance des gardes champêtres et de la gendarmerie nationale. » Mieux, l’article 24 du Code de procédure pénale (CPP) précise que « les gardes champêtres peuvent se faire donner main-forte par le maire, l'adjoint ou le commandant de brigade de gendarmerie qui ne pourront s'y refuser » ! Preuve que les gardes champêtres, trop souvent oubliés, disposent de compétences bien plus étendues que les agents de police municipale. Mais c’est vers cette dernière profession que s’orientent dorénavant les gendarmes.

Quid des motivations des intéressés ? L’engouement des gendarmes s’explique en partie par la mise sous tutelle de leur institution au bénéfice du ministère de l’Intérieur. En effet, le rapprochement police/gendarmerie ne suscite guère d’enthousiasme parmi les militaires – et c’est un euphémisme ! – d’autant que l’accueil policier n’est guère chaleureux comme en témoigne la « Lettre ouverte à un gendarme » publiée en janvier 2008 dans le numéro 292 du magazine Police Nouvelle (3) du Syndicat national des officiers de police (SNOP). Dès lors, les deux entités ferraillent par élus interposés, activant chacune leurs lobbies respectifs. Les tensions sont donc palpables, d’autant que cette politique s’accompagne de coupes sévères dans les effectifs respectifs.

L’Etat dégraisse, en effet, ses effectifs tandis que la Fonction publique territoriale (FPT) recrute pour compenser le désengagement étatique : elle est même devenue le premier recruteur de la Fonction publique ! Alors qu’il n’y aura pas de concours de gardien de la paix cette année, annulé par décision ministérielle pour des raisons purement comptables, et que l’incorporation en école de police des lauréats dudit concours est reportée sine die pour les mêmes motifs, les centres départementaux de gestion de la FPT multiplient les concours de gardien de police municipale pour répondre à la demande croissante des municipalités et soulager l’importante tension sur cette profession. D’ailleurs, est-ce un hasard si le gouvernement promeut simultanément, sans succès jusqu’à présent, un système d'aide au départ pour les agents de la Fonction publique d’Etat (4) ? Le sociologue Laurent Mucchielli souligne à ce sujet que « la France s'est engagée depuis 2002 dans une "frénésie sécuritaire" qui ne cesse de s'amplifier depuis l'élection de Nicolas Sarkozy alors qu'on assiste en réalité à un désengagement, notamment en termes d'effectifs et de présence sur le terrain » (lexpress.fr – 24 juin 2009). Malgré les discours lénifiants du gouvernement, les élus locaux ne sont pas dupes ! Ainsi, cette récente déclaration d’Emilie Thérouin, adjointe au maire d’Amiens en charge à la sécurité et à la prévention des risques urbains : « Alors que des baisses d’effectifs sont programmées dans la police nationale et la gendarmerie, les collectivités sont incitées à prendre une part toujours plus importante dans le maintien de l’ordre public » (La Gazette des communes, 22 juillet 2009). Or, comme le maire représente l'Etat dans la commune et se trouve investi des fonctions d'officier d'état civil et de police judiciaire, il est fort à parier qu'à terme, le rapprochement entre la gendarmerie et la police se soldera par un renforcement des pouvoirs de police des collectivités territoriales.

Ceci dit, les vrais éléments de réponse aux départs sont dans le quotidien des gendarmes. Dans son premier rapport remis le 1er février 2007, le Haut Comité d’évaluation de la condition militaire (5) expliquait le phénomène en ces termes : « Les principaux motifs de départ sont d'ordre familial, professionnel et économique. Selon les études réalisées par les états-majors, confirmées par les opinions recueillies, la principale cause des départs anticipés réside dans les difficultés à concilier la vie professionnelle et la vie familiale. La stabilité géographique et ses bénéfices en termes notamment d'accession à la propriété, d'emploi du conjoint et de qualité de la vie familiale sont les premiers avantages attendus du départ. D’un point de vue professionnel, la dégradation des conditions de travail imputée à des moyens jugés insuffisants est le motif le plus souvent cité, associé ou non à des insatisfactions en matière de carrière auxquelles peuvent s'ajouter une sensation d'usure et l'envie de changer radicalement d'activité. De nombreux militaires estiment enfin le secteur civil, public ou privé, moins exigeant et plus rémunérateur. »

La famille est, en effet, soumise à rudes épreuves : souvent reléguée et sous-estimée, elle doit endurer la vie en caserne, parfois dans des logements insalubres.... Cette situation mal vécue motive le militaire à quitter l'Arme pour préserver sa famille, d’autant que l'absence de vie privée est ici écrasante : imaginez-vous vivre au quotidien avec tous vos collègues de travail que vous voyez même pendant vos repos et vacances, qui savent en permanence qui vous recevez car chacun regarde à sa fenêtre dès que quelqu’un passe dans la cour. Certains couples supportent cette promiscuité, d’autres pas… et en cas de divorce, vous encaissez les réflexions de vos supérieurs.

Les contraintes professionnelles sont aussi décisives. Le statut militaire autorise, en effet, un emploi intensif des gendarmes, en termes de temps de travail et de disponibilité, rendu possible par le logement en caserne. Les semaines de 50, voire 70 heures ne sont donc pas rares, le tout sans un centime de plus à la fin du mois, ni même un jour de repos supplémentaire ! Des patrouilles de nuit en sus des journées, sans oublier les interventions sur des accidents ou des violences familiales à trois heures du matin, par exemple, alors que le militaire est couché depuis une heure après avoir fait sa patrouille de 22 heures à 2 heures. A cette disponibilité permanente s’ajoute l’obligation de mutation pour prendre du galon. Or, certains gendarmes cherchent la stabilité géographique pour diverses raisons : enracinement dans la commune de résidence, travail de l’épouse, scolarité des enfants… D’autres saisissent l’opportunité de rejoindre leur région d’origine, notamment si leur affectation ne leur sied pas. Il y a enfin les déçus, ceux dont la carrière est bloquée pour moult raisons. Le Haut Comité d’évaluation de la condition militaire révèle ainsi que « Parmi les sous-officiers, tous recrutements confondus, un sur trois environ accède au grade d’adjudant-chef et un sur cinq à dix au grade de major, selon les armées. » (6)

Le poids de la hiérarchie est également prépondérant dans le choix des intéressés, qui n’hésitent plus à vilipender celle-ci en privé. Le manque de considération est ainsi une critique récurrente vis-à-vis du commandement, accusé de négliger le rapport avec la base ; cédant aux sirènes politiques, les officiers sont plus attentifs à leur carrière qu’à leurs troupes malgré leur formation en DRH. Or, les gendarmes n’en peuvent plus des pressions croissantes d’une hiérarchie uniquement soucieuse de présenter de bons chiffres. Ils en ont ras le képi de cette inlassable course aux résultats ! Ils dénoncent pêle-mêle la répression aveugle tout azimut et la politique du chiffre, qui les déshumanisent, qui les divisent et, finalement, les fragilisent.

Le salaire n’est pas un frein à la migration gendarmesque, au contraire ! En effet, les titulaires de pensions de sous-officier réunissant moins de 25 ans de services effectifs (civils et militaires) sont exonérés des règles du cumul d'une pension et d'une rémunération d'activité. Ils peuvent donc percevoir à la fois leur pension (7) et leurs nouveaux émoluments d'activité et ce, quels qu'en soient le montant et l'organisme public ou privé qui les leur verse. Or, l’âge moyen de départ à la retraite pour les sous-officiers de gendarmerie est de 45,6 ans (6) alors que les fonctionnaires civils des services actifs partent à 54 ans pour la police nationale, 53,7 pour l’administration pénitentiaire et 56,4 pour ceux de l’aviation civile. Les prétendants sont donc encore relativement jeunes et, grâce au droit de cumul, se retrouvent avec un niveau de vie nettement augmenté, adjoint à une meilleure qualité de vie (35 heures, astreintes réduites et heures supplémentaires payées). Ainsi, un militaire quittant l’Arme après 16 années de bons et loyaux services peut espérer une retraite gendarmerie de 700 euros (1.100 euros pour 21 ans) dès sa titularisation en tant qu’agent de police municipale ou, mieux encore, comme chef de service de police municipale, même si les opportunités sont moins nombreuses, soit, au 1er juillet 2009, 1.336,69 euros brut au 1er échelon dans le premier cas (1.364,26 euros pour la seconde hypothèse). En réalité, l’ancienneté des gendarmes étant prise en compte (8), leur traitement s’élève dès titularisation à 1.506,65 euros, soit le salaire d’un brigadier-chef principal au 1er échelon, hors primes (indemnité spéciale de fonctions de 18 %, indemnité d'administration et de technicité, indemnités horaires pour travaux supplémentaires en cas d’heures supplémentaires et/ou de travail dominical, nouvelle bonification indiciaire en raison de leurs fonctions…) variables d’une commune à l’autre. Soit un minimum de 2.200 euros mensuels !

Enfin, le détachement est sécurisé. En vertu de l’article R4139-2 du Code de la défense, le ministère couvre la perte de salaire du gendarme devenu gardien stagiaire. De même, en cas de difficultés inopinées, « La période initiale de détachement peut être prolongée pour une période de même durée » (article L4139-2). Si les difficultés perdurent, rien n’est perdu puisque l’article R4139-26 prévoit qu’« Il peut être mis fin au détachement avant son terme, à l'initiative du militaire ou à la demande de l'administration, ou de l'établissement public d'accueil, après avis de la Commission nationale d'orientation et d'intégration, lequel est transmis au ministre de la défense et à l'autorité chargée de la gestion du corps d'accueil. Le militaire est alors réintégré de plein droit dans son corps d'origine ou de rattachement, dans les conditions prévues à l'article L.4139-4. » Enfin, en cas d’échec, point de déconvenue : « Le militaire non intégré ou non titularisé au titre des dispositions des articles L.4139-1 à L.4139-3 est réintégré, même en surnombre, dans son corps d'origine ou sa formation de rattachement » (article L4139-4). Dernière petite astuce : l'année de détachement, donc de stage, compte comme une année de service, donc pour les 15 ans, quantum nécessaire pour bénéficier d’une retraite, aussi maigre soit-elle (environ 650 euros). Toutefois, certains gendarmes, exaspérés, désabusés ou désespérés, quittent aujourd’hui l’institution sans avoir le quota pour toucher une retraite immédiate. Conscients qu’ils n’auront pas droit au pécule de départ puisqu’ils demeurent dans la Fonction publique et qu’ils vont perdre en terme de rémunération, ils privilégient délibérément la qualité de vie et tournent ainsi effrontément le dos au solennel principe présidentiel du travailler plus pour gagner… des nuts !


(1) « La loi "mobilité" décryptée », dossier réalisé par Marie Bidault sur le site Emploi public.
http://infos.emploipublic.fr/category/essentiel/la-loi-mo...

(2) « C’est par les lois du 23 septembre et du 6 octobre 1791, qui définissent la police rurale dans le cadre de l’élaboration du code rural, qu’est véritablement instauré le corps des gardes champêtres. Mais c’est la loi du 8 juillet 1795 (Messidor an III) prise par l’assemblée thermidorienne qui définit le statut du garde champêtre, le rendant entre autre obligatoire dans toutes les communes rurales de France et établit des critères de recrutement précis. » (Fédération nationale des gardes champêtres communaux et intercommunaux de France)

(3) http://www.snop.info/pdf/pndbn/pn292.pdf

(4) Décret n°2008-368 du 17 avril 2008 instituant une indemnité de départ volontaire.

(5) Instauré par le décret n°2005-1415 du 17 novembre 2005, « Le Haut Comité d'évaluation de la condition militaire a pour mission d'éclairer le Président de la République et le parlement sur la situation et l'évolution de la condition militaire. Il prend en compte tous les aspects favorables ou défavorables, juridiques, économiques, sociaux, culturels et opérationnels susceptibles d'avoir une influence, notamment sur le recrutement, la fidélisation, les conditions de vie des militaires et de leurs familles et les conditions de réinsertion dans la société civile » (article D4111-1 du Code de la défense). « Dans son rapport annuel, le Haut Comité d'évaluation de la condition militaire formule des avis et peut émettre des recommandations » (article D4111-2).

(6) 3ème rapport du Haut Comité d’évaluation de la condition militaire en date du 1er juin 2009.

(7) Retraite à jouissance immédiate avant la limite d’âge, dont le montant et le taux de liquidation sont augmentés par l’attribution de bonifications (bonification du cinquième et bonifications pour activités militaires spécifiques).

(8) L’article L4139-2 du Code de la défense spécifie qu’« En cas d'intégration ou de titularisation, l'intéressé est reclassé à un échelon comportant un indice égal ou, à défaut, immédiatement supérieur à celui détenu dans le corps d'origine. »


Nota bene : cet article a été publié pour la première fois le 5 septembre 2009 sur le site Dans le secret des faits du journaliste feu Philippe Madelin ; ce fut à l’époque l’un des dix articles les plus consultés de son blog : http://phmadelin.wordpress.com/2009/12/31/les-dix-billets...