12/08/2013

QUAND LES BOULANGERS SE FONT DORER LES MICHES

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« Mais où trouver du bon pain en été ? », titre Le Populaire du Centre. Cette question n’est pas exclusive à Limoges (Haute-Vienne) mais récurrente dans beaucoup de villes.

 

« L'été, notre activité baisse de manière conséquente. Et c'est entre le 14 juillet et le 15 août qu'elle ralentit le plus. Ces semaines-là sont donc le meilleur moment pour un boulanger de partir en vacances en perdant le moins d'argent », indique le président départemental de la Chambre syndicale des boulangers et boulangers-pâtissiers, Gilbert Rebeyrole. Mais pour éviter de trop mettre les clients dans l'embarras, certains concurrents s'accordent sur les dates de départ. […] Pour le président de la Chambre syndicale régionale, Maurice Carré, il s'agit là de la meilleure solution à adopter. « Le roulement est un réflexe intelligent. Assurer la permanence lorsque ses concurrents sont partis permet d'augmenter son activité avant de fermer pour congés. Il y a deux ou trois ans, nous avions même distribué des petits panonceaux pour que celui qui part puisse indiquer la boulangerie la plus proche sur sa vitrine. » Problème : tous ne le font pas. Et aucune liste, ni le moindre site Internet ne permettent de connaître les dates de fermeture des boulangeries pendant l'été. (1)

 

Même constat à Compiègne dans l’Oise : « Ça se passe comme ça partout, commente Philippe Trinchez, conseiller municipal délégué au commerce. Mais on ne peut intervenir sur les ouvertures. Nous avons bien fait des essais avec la fédération des boulangers de l'Oise, il y a des années, mais ça n'a pas fonctionné. » La mairie publie simplement les dates des vacances des artisans, quand ceux-ci les lui donnent... (2) Une impuissance municipale d’autant plus incongrue que l’article L2212-2 du Code général des collectivités territoriales fixe pourtant – depuis des lustres – parmi les compétences des policiers municipaux : « Le soin de réglementer la fermeture annuelle des boulangeries, lorsque cette fermeture est rendue nécessaire pour l'application de la législation sur les congés payés, après consultation des organisations patronales et ouvrières, de manière à assurer le ravitaillement de la population. » Il est vrai que la police municipale de cette localité huppée a d’autres priorités, notamment la chasse aux SDF. (3) Bien évidemment, ces derniers votent rarement et, ici comme ailleurs, c’est le maire – le sénateur UMP Philippe Marini dans le cas présent – qui établit les missions de sa police ; comme le spécifie l’article L511-1 du Code de la sécurité intérieure, « les agents de police municipale exécutent, dans la limite de leurs attributions et sous son autorité, les tâches relevant de la compétence du maire que celui-ci leur confie en matière de prévention et de surveillance du bon ordre, de la tranquillité, de la sécurité et de la salubrité publiques. » En attendant, « Tous les étés, c'est la même question : où trouver son pain à Compiègne ? »

 

(1) Marion Buzy, « Les boulangeries ferment en août, faute d’activité suffisante à Limoges » in Le Populaire du Centre, 12 août 2013.

http://www.lepopulaire.fr/limousin/actualite/2013/08/12/les-boulangeries-ferment-en-aout-faute-d-activite-suffisante-a-limoges-1655030.html

 

(2) A.G., « Compiègne. Les boulangeries ouvrent et ferment comme bon leur semble » in Le Courrier picard, 3 août 2013.

http://www.courrier-picard.fr/region/les-boulangeries-ouvrent-et-ferment-comme-bon-leur-semble-ia190b0n150559

 

(3) Cindy Lécrivain, « La ville de Compiègne fait la chasse aux SDF » in Le Courrier picard, 8 août 2013.

http://www.courrier-picard.fr/region/la-ville-de-compiegne-fait-la-chasse-aux-sdf-ia190b0n154117

09/08/2013

UNIVERSITÉ : LA GÉNÉROSITÉ D'ARPAGON ?

Légère augmentation et sensible extension des bourses aux étudiants les plus modestes. (1) Cette annonce estivale devrait réjouir les principaux intéressés... à condition que cette mesure ne s'accompagne pas d'une hausse des droits d'inscription. Or, autonomie oblige, les universités françaises sont aujourd'hui en mal de financement ; "La conférence des présidents d'université a estimé à 10 milliards d'euros les financements supplémentaires nécessaires si l'on souhaite que les universités françaises rivalisent avec celles des autres pays développés." (2) En dépit des discours lénifiants, l'Etat n'a plus les moyens de ses ambitions et ce, depuis plusieurs années (en 2007, Nicolas Sarkozy avait promis de consacrer 3 % du PIB à la recherche et à l'enseignement supérieur, une promesse jamais concrétisée). La multiplication des ressources est donc impérative pour nos universités, ce qui induit la nécessité d'instaurer - avec la bénédiction de l'Etat - des partenariats avec le secteur privé, doux euphémisme d'une privatisation rampante, qui n'empêchera pas, cependant, un endettement croissant des étudiants auprès des généreux mécènes que sont les organismes de crédit, qui proposent d'ores et déjà des prêts différés à des taux variables en fonction des garanties de remboursement (la caution parentale est l'élément le plus déterminant pour l'acceptation du crédit par une banque). Aux Etats-Unis, l'endettement étudiant atteint désormais les mille milliards de dollars et les étudiants y sont durablement endettés avant même de travailler... (3) Le modèle anglo-saxon suscite pourtant l'intérêt de l'aile droite du PS, incarnée par Manuel Valls, Pierre Moscovici et Cie, désormais plus proche du social-libéralisme que de la social-démocratie. (4)

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(1) Marie-Christine Corbier, Les aides aux étudiants revalorisées dès la rentrée 2013 in Les Echos, 16 juillet 2013.

http://www.lesechos.fr/economie-politique/politique/actu/...

 

(2) Manuel Valls, Pouvoir, Stock, 2010, 288 pages, pages 189 et 190.

 

(3) Sylvain Cypel, Aux Etats-Unis, la dette estudiantine atteint mille milliards de dollars in Le Monde, 15 mai 2013.

http://www.lemonde.fr/education/article/2013/05/15/aux-et...

 

(4) Dans son livre Pouvoir, Manuel Valls souligne que "L'exemple des universités britanniques est intéressant" (page 190).

03/07/2013

LA FRANCE EN FAILLITE ? TOO BIG TO FAIL !

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« 2014 : un budget de rigueur historique », titre Le Monde dans son édition des dimanche 30 juin et lundi 1er juillet 2013. Ce budget est une réponse aux rappels à l’ordre de Bruxelles et de la Cour des comptes. « Je suis à la tête d’un Etat qui est en situation de faillite », avait lancé, le 21 septembre 2007, François Fillon lors de son premier déplacement officiel en Corse en tant que Premier ministre. Un « Etat totalement en faillite », surenchérissait Michel Sapin, le ministre du Travail, le dimanche 27 janvier 2013 sur Radio J. Une saillie sous forme d’ironie, paraît-il. [1] Dans tous les cas, « la France est dans une situation terrifiante. La récession va s’aggraver, donc le chômage va augmenter. Il y a le feu » (dixit Michel Rocard). [2] Il est vrai que la charge de la dette (c’est-à-dire ses intérêts) est devenu le premier poste budgétaire de la France en 2012 (donc sous la présidence de Nicolas Sarkozy), soit, à titre de comparaison, presque la totalité de l’impôt sur le revenu payé par les Français cette année-là ! [3] Dans la loi de finances 2013, elle s’élève à 56,14 milliards d’euros, soit 14,19 % du budget de l’État ! [4] Logiquement, « La charge de la dette grève les marges de manœuvre de l’action publique ». [5] Pourtant, ce n’est pas l’existence de la dette qui pose problème mais que celle-ci ne génère pas de croissance. On peut, en effet, toujours refinancer cette dernière, d’autant qu’elle fait vivre les marchés financiers pour lesquels c’est une véritable rente ! Dès lors, ceux-ci n’ont aucun intérêt à tuer la poule aux œufs d’or. D’ailleurs, imagine-t-on sérieusement à Paris ou à Bruxelles que notre pays, deuxième puissance européenne et cinquième mondiale, fasse vraiment défaut un jour ? La chute de la France ferait passer la faillite de Lehman Brother [6] pour une douce rigolade puisqu’un tel naufrage aspirerait toute la zone euro, qui sombrerait alors dans les abîmes en entraînant à son tour l’économie mondiale dans un infernal et dévastateur maelström. Ce serait l’an zéro de la mondialisation ! Cette apocalypse financière aux conséquences incalculables effraie assurément les citoyens mais s’apparente en réalité aux contes de Grimm, des contes d’autant plus populaires qu’ils étaient en vérité au service de la morale puritaine et patriarcale.

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[1] « Pour Sapin, la France "totalement en faillite", et l’ironie » in Libération avec AFP, 27 janvier 2013.

http://www.liberation.fr/politiques/2013/01/27/pour-sapin-la-france-est-totalement-en-faillite_877114

 

[2] Nicolas Prissette, « Rocard : "Travailler jusqu’à 65 ans" » in Le Journal du dimanche, samedi 26 janvier 2013

http://www.lejdd.fr/Politique/Actualite/Michel-Rocard-propose-de-travailler-jusqu-a-65-ans-588196

 

[3] « La charge de la dette devient le premier poste budgétaire de la France » in France Info, mercredi 28 septembre 2011.

http://www.franceinfo.fr/france-politique-2011-09-28-la-charge-de-la-dette-devient-le-premier-poste-budgetaire-de-la-565089-9-10.html

 

[5] Marie de Vergès, « La charge de la dette grève les marges de manœuvre de l’action publique » in Le Monde, 15 mai 2013.

http://www.lemonde.fr/economie/article/2013/05/15/la-charge-de-la-dette-greve-les-marges-de-man-uvre_3230341_3234.html

 

[6] Caroline Talbot, « Le jour où… Lehman Brothers a fait faillite » in Libération, 14 septembre 2009.

http://www.liberation.fr/economie/0101590674-le-jour-ou-lehman-brothers-a-fait-faillite

 

Alexandra Le Chaffotec et Thomas Porcher, enseignants-chercheurs à l'ESG Management School, « De la faillite de Lehman Brothers à la crise grecque » in La Tribune, 3 octobre 2011.

http://www.latribune.fr/opinions/20111003trib000653630/de-la-faillite-de-lehman-brothers-a-la-crise-grecque.html

 

Grégory Raymond, « Chute de Lehman Brothers : tout ce que vous devez savoir sur ce qu’il s’est passé depuis » in Le Huffington Post, 15 septembre 2012.

http://www.huffingtonpost.fr/2012/09/14/lehman-brothers-crise-subprimes-grece-fed-bce-euro_n_1884756.html